[Podcast Ép. 65] Billet 🔊 – Affaire McKinsey : les hommes du président

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On se souvient que parmi les premiers actes d’Emmanuel Macron à son arrivée à l’Élysée, la diminution des APL et la suppression de l’ISF ont contribué à lui forger l’image indélébile de « Président des riches ». Cinq ans plus tard, la publication du rapport de la commission d’enquête du Sénat sur le recours par l’État aux cabinets de conseil vient nous apprendre que ce sont précisément ces cabinets de conseil qui lui ont soufflé le scénario qui a conduit à la baisse de 5 euros par mois (60 euros à l’année) des aides personnelles au logement. Emmanuel Macron a donc aussi été le président des cabinets de conseil comme le pointe le rapport sénatorial.

 

 

Celui-ci révèle un « phénomène tentaculaire », au coût croissant pour les finances publiques. Il montre que le volume des contrats passés avec ces cabinets a été multiplié par presque 2,4 entre 2018 et 2021. Les dépenses liées aux prestations de conseil au sein de l’État passant de 397,1 millions d’euros en 2018, à près de 893,9 millions en 2021. Aujourd’hui, l’État délègue la rédaction de l’exposé des motifs de lois à ces consultants privés, payés 1 500 euros par jour.

Mais la macronie ne s’est pas contentée d’abandonner la souveraineté du pilotage de l’action publique, elle a aussi largement accru l’externalisation de pans entiers du service public dans les domaines cruciaux de la santé, de la protection sociale, de la sécurité.

Ainsi, selon le collectif, nos services publics qui rassemblent notamment des cadres supérieurs des trois versants de la fonction publique, le recours à l’externalisation de missions publiques au privé va au-delà de ces études et conseils. Il s’est même « accéléré́ depuis le milieu des années 1990, il prend des formes juridiques de plus en plus variées et représente aujourd’hui un total d’au moins 160 milliards, soit l’équivalent du quart du budget de l’État », dénonçait le collectif dans une note en avril 2021.

Au-delà des questions démocratiques que pose ce recours à des cabinets privés, dont les scénarios préférés sont en général suivis par les décideurs politiques, se posent aussi des questions d’efficacité économique. Et au sujet de ces multiples études commandées, la note du collectif démentait l’idée selon laquelle ces prestations intellectuelles du privé permettraient de bénéficier de regards neufs, d’expertises et compétences alternatives à celles qu’on trouve au sein de la fonction publique. Car les profils des consultants se distinguent très peu de ceux des décideurs publics qu’ils conseillent : mêmes écoles, voire parfois mêmes concours de la fonction publique. Mais plus grave est l’assèchement et la fragilisation de « tout un patrimoine immatériel des services publics, de compétences métier, de savoir-faire d’organisation, voire parfois de réflexion stratégique », pointe la note. Ce recours massif à l’externalisation « aboutit donc à un recul de la souveraineté́ et de la capacité de pilotage du service public sur ses propres missions lorsqu’il s’agit de fonctions de conception des politiques publiques ou de fonctions régaliennes comme la santé, le contrôle ou la sécurité́ ».

L’étendue de l’externalisation pointée par le rapport sénatorial arrive à point nommé à la fin d’un quinquennat totalement paradoxal pour le service public. Ces cinq ans ont révélé comme jamais le besoin de service public et en même temps la crise profonde de l’action publique. Les discours sur le dégraissage de la fonction publique ne font plus recette. Ces cinq années ont aussi fait émerger le besoin de reconnaissance des qualifications des agents publics, l’exigence d’un renforcement de leurs effectifs. Elles ont aussi vu monter parmi les fonctionnaires une exigence de sens de leurs missions comme l’ont révélé les différents baromètres de l’encadrement réalisés par la CGT des ingénieurs, cadres et techniciens. Les cadres de la fonction publique ont un terrain à reconquérir, celui du conseil, de l’aide à la décision afin de piloter le service public vers la réponse aux besoins et pas vers la privatisation. C’est une exigence démocratique.

 

Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT

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