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Il y a des jours oĂą les actualitĂ©s se tĂ©lescopent. Ainsi jeudi dernier, tandis qu’Emmanuel Macron tenait une confĂ©rence de presse sur la prĂ©sidence française de l’Union europĂ©enne Ă partir de janvier prochain, la Commission europĂ©enne prĂ©sentait un projet de rĂ©solution visant Ă accorder aux travailleurs des plateformes numĂ©riques, les livreurs et chauffeurs notamment, mais pas seulement, une prĂ©somption de salariat.
C’est un Ă©vĂ©nement puisque ce projet arrive après que le Parlement europĂ©en se soit prononcĂ© en septembre dernier pour faire reconnaĂ®tre Ă ces travailleurs le statut de salariĂ©s, et ce Ă la suite d’une cascade de dĂ©cisions politiques ou de jugements qui en Europe et ailleurs dans le monde mettent Ă mal le modèle sur lequel se fonde l’Ă©conomie des plateformes, c’est-Ă -dire l’illusion de l’indĂ©pendance. Elle considère que les livreurs ou les chauffeurs et d’autres catĂ©gories de travailleurs de plateformes de mise en relation devront bĂ©nĂ©ficier d’une prĂ©somption de salariat et donc d’un contrat de travail dès lors que leur rĂ©munĂ©ration est imposĂ©e par la plateforme, qu’ils sont astreints Ă respecter des règles spĂ©cifiques et contraignantes dans leur travail ou Ă dans leur apparence. Dès lors que l’exĂ©cution du travail est supervisĂ©e et que la qualitĂ© est vĂ©rifiĂ©e par la plateforme. Que le travailleur puisse ĂŞtre restreint dans son pouvoir d’organiser son travail notamment par des sanctions et qu’il ne peut se constituer une clientèle ou travailler pour un tiers. Cinq critères ont Ă©tĂ© retenus et la Commission estime que deux seulement de ces conditions seraient suffisantes pour dĂ©terminer qu’un travailleur n’est pas indĂ©pendant, mais bel et bien salariĂ©.
La coĂŻncidence avec la prĂ©sidence prochaine de l’Union par Emmanuel Macron est d’autant plus singulière que lui et son gouvernement freinent des quatre fers pour reconnaĂ®tre cette prĂ©somption de salariat afin de ne pas fragiliser le modèle Ă©conomique des Uber, Deliveroo et autre Frichti.
Ce qui est intĂ©ressant dans cette affaire qui n’en est qu’Ă ces premières pĂ©ripĂ©ties, c’est que la plateformisation du travail, l’extension de l’auto-entreprenariat vont toucher un nombre croissant de mĂ©tiers ou de secteurs comme la santĂ© ou les avocats et juristes, les experts et auditeurs auprès des entreprises. Une bataille menĂ©e par Eurocadres, pour garantir que les avancĂ©es arrachĂ©es pour les travailleurs et travailleuses des plateformes s’appliquent Ă tous et toutes, quel que soit leur niveau de qualification, et pas seulement aux livreurs [https://www.eurocadres.eu/news/progress-as-european-commission-delivers-protections-for-platform-workers/].
La distorsion du lien de subordination est dĂ©jĂ Ă l’Ĺ“uvre. Elle est une tendance lourde qui pourrait se renforcer avec la montĂ©e en puissance du tĂ©lĂ©travail. L’Ă©clatement des collectifs de travail, la rĂ©duction des parcs de bureau, le flex-office sont des tendances qui pourraient tout Ă fait accompagner et mĂŞme favoriser l’externalisation de salariĂ©s qualifiĂ©s et plus seulement des livreurs Ă vĂ©lo. Le travail Ă la tâche, l’indĂ©pendance fantasmĂ©e sont des marqueurs des transformations du travail. Si ces transformations sont aujourd’hui – et depuis dix ans – incarnĂ©es par Uber qui a donnĂ© son nom Ă l’uberisation, elles sont en passe de toucher bien d’autres catĂ©gories de travailleurs et travailleuses au seul bĂ©nĂ©fice des entreprises.
Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT
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