[Tribune LeMonde.fr] Pour une nouvelle définition de l’entreprise, comme collectif humain créateur de richesses

Pour en savoir plus


Temps de lecture : 4 minutes

Définanciariser l’entreprise et le travail : une urgence à notre portée. Une tribune à lire ici (et sur LeMonde.fr) ou à signer sur ugict.cgt.fr/entreprise

Définanciariser l’entreprise et le travail doit être au cœur du débat présidentiel. Pour sortir – enfin ! – de la crise, mais surtout pour répondre aux enjeux d’aujourd’hui et de demain : développer un modèle de production et de consommation soutenable à long terme et respectueux des ressources environnementales, mais aussi pour construire le numérique autrement en empêchant la captation des richesses par les géants du numérique.

Une distribution record de dividendes et 63 000 faillites d’entreprises en France en 2015, ces deux chiffres trop rarement rapprochés diagnostiquent l’asphyxie de notre économie par le coût du capital des multinationales. La captation des richesses créées se fait au détriment de l’investissement – empêchant la modernisation de notre appareil productif – et des salaires – provoquant ainsi une contraction de la consommation et de la demande intérieure.

Il n’y a pas de définition légale de l’entreprise. Le droit commercial ne connait que la société de capitaux, dont l’objet social est de maximiser la rentabilité du capital investi et le droit du travail limite la responsabilité envers les salariés à l’employeur en titre.Cette carence juridique déséquilibre le système de pouvoir au sein de l’entreprise. Elle permet d’assimiler les dirigeants à de simples mandataires des actionnaires et de les intéresser au rendement du capital par un système de rémunération avec des stock-options.

Nous pouvons et devons mettre en place une nouvelle définition juridique de l’entreprise, comme collectif humain créateur de richesses, reconnaître un statut au chef d’entreprise, distinct du simple mandataire désigné par les actionnaires, et instituer une règle de solidarité avec modulation de la voix des actionnaires en fonction de la durée de leur engagement.

Il s’agit également de renforcer le rôle des salariés et de restaurer le rôle contributif de l’encadrement, de façon à faire primer l’avis de celles et ceux qui défendent les intérêts de l’entreprise à moyen et long terme. Limitée à un devoir de loyauté aux directives financières, la responsabilité professionnelle doit être réhabilitée et adossée à l’intérêt général, avec un droit de refus, d’alerte et de proposition alternative pour faire primer l’éthique professionnelle.

Les comités d’entreprise doivent disposer de droits d’informations élargis et de pouvoirs supplémentaires, leur permettant de peser sur le choix des investisseurs, les pactes d’actionnaires, et la situation de l’ensemble de la chaîne de production à laquelle ils sont intégrés.Il est indispensable ensuite de protéger nos entreprises des fonds prédateurs, renforcer les droits des salarié-es en cas de cession et réformer en profondeur les tribunaux de commerce pour empêcher le clientélisme. Les comités d’entreprise doivent disposer de droits décisionnels sur la stratégie d’entreprise, et notamment celui de suspendre les aides publiques et les licenciements. Pourquoi ne pas instaurer, comme en Allemagne, la parité entre les salariés et les actionnaires au sein des conseils d’administrations ?

Il s’agit enfin de mettre les banques et la finance au service de l’économie en réorientant les crédits bancaires vers l’activité durable et créatrice d’emploi et en adoptant une politique résolue de lutte contre l’optimisation et la fraude fiscale.

L’entreprise ne peut plus être gérée en fonction du seul critère de la rentabilité financière, au dépens de nos besoins économiques, sociaux et environnementaux. Il est temps de réagir pour dessiner un autre avenir à nos entreprises et notre société.

Premiers signataires :

  • Tristan Auvray, Maître de conférences en économie, Université Paris 13
  • Claude Alphandery, président d’honneur du Labo de l’Economie Sociale et Solidaire
  • Sophie Binet et Marie José Kotlicki, secrétariat général de l’UGICT-CGT
  • Daniel Bachet, professeur de sociologie à l’université d’Evry
  • Savine Bernard, avocate
  • Frédéric Boccara, économiste, Université de paris 13, membre du CESE
  • Eric Bocquet, sénateur du Nord
  • Alain Bocquet, député du Nord
  • Jean-François Bolzinger, président de l’institut LEA (L’Entreprise Alternative)
  • Emmanuelle Boussard-Verrechia, avocate
  • Carlos Bowles, Economiste, Vice-Président du syndicat des salariés de la Banque Centrale Européenne (IPSO)
  • Christophe Chevallier, porte-parole des ECOPLA
  • Laurent Cordonnier, économiste au CLERSE (Lille 1)
  • Benjamin Coriat, Professeur de Sciences économiques , Membre du Comite d Animation des Économistes Atterres 
  • Thomat Coutrot, économiste, chef du département « conditions de travail et santé » à la DARES
  • Thomas Dallery, Maître de conférences en économie, Université du Littoral Côte d’Opale
  • Thibault Darcillon, Maître de conférences en économie à l’Université Paris 8
  • Hervé Defalvard, Economiste, maître de conférences à l’université Paris-Est-Marne-la-Vallée.
  • Caroline De Haas, cheffe d’entreprise
  • Josepha Dirringer, juriste, maitresse de conférence à Rennes 1, membre du GR PACT.
  • Emmanuel Druon, Président d’une entreprise de fabrication d’enveloppes
  • Denis Durand, économiste à la banque de France, directeur de la revue Economie et Politique
  • Guillaume Duval, journaliste
  • Olivier Favereau, professeur de sciences économiques à l’Université Paris Nanterre
  • Louise Gaxie, coordinatrice de Silo
  • Anthony Gratacos, President de la SAS Gratacos Père et Fils
  • Armand Hatchuel, Blanche Segrestin et Kevin Levillain, Professeurs à l’école des Mines ParisTech
  • Patrick Henriot, président du Syndicat de la Magistrature
  • Liem Hoang-Ngoc, économiste, maitre de conférence à l’université Paris 1
  • Jean Gadrey, économiste, ancien professeur à l’université de Lille 1
  • Sabina Issehnane, économiste Maitresse de conférence à l’Université Rennes 2
  • Florence Jany-Catrice, économiste, Université Lille 1
  • Eva Joly, députée européenne
  • Hubert Landier, expert en relations sociales du travail 
  • Dany Lang, économiste, université Paris 13
  • Olivier Leberquier : Ex-Délégué syndical CGT de Fralib , Directeur Général Délégué de SCOP TI
  • Nasser Mansouri, économiste, CGT
  • Igor Martinache, professeur agrégé en économie l’Université Lille 1
  • Antoine Math, chercheur à l’Institut de Recherches Economiques et Sociales (IRES)
  • Dominique Meda, professeure de sociologie à l’Université Paris-Dauphine,
  • Nicolas Merigot, Délégué général du Centre des Jeunes Dirigeants de l’Economie Sociale (CJDES)
  • Michel Meunier, PDG de Janus Groupe, Président de la fondation Condorcet
  • Isabelle Meyrat, juriste, maitresse de conférence à l’université Cergy Pontoise
  • Jean-Paul Milesy, Délégué général de Rencontres sociales
  • Christian Pallois, économiste
  • Dominique Plihon, économiste, porte-parole d’Attac
  • Nicolas Postel, économiste au CLERSE (Lille 1)
  • Christophe Ramaux, économiste, maitre de conférence à l’université Paris 1
  • Michel Rocca, Professeur à la Faculté d’Economie de Grenoble
  • François Ruffin, journaliste, réalisateur de « Merci Patron »
  • Jean Sammut, mutualiste, président de Procial
  • Hervé Serieyx, Président d’honneur de la Fédération Française des Groupements d’Employeurs de France
  • Richard Sobel, économiste, université Lille 1
  • Daniel Sommer, PDG de Speed Rabbit Pizza
  • Henri Sterdyniak, économiste, Co-animateur des Economistes Atterrés
  • Jean-Paul Teissonière, avocat
  • Bruno Tinel, économiste, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
  • Quentin Urban, juriste, maitre de conférences à l’université de Strasbourg
  • Michaël Zemmour, économiste, maitre de conférence université de Lille 1, CLERSE
  • Le collectif des économistes Atterrés

Appel à retrouver sur lemonde.fr

Restez informés


À propos

Voir aussi

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *