Ensemble, nous ferons de 2021 l’année de l’action

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À l’occasion de la nouvelle année, Sophie Binet et Marie-José Kotlicki, secrétaires générales de l’Ugict-CGT se sont adressées directement aux internautes et aux militant·es pour partager quelques notes d’espoir et d’optimisme pour 2021.

L’année 2020 aura été inédite, difficile pour nombre d’entre nous, à titre personnel et professionnel.

Le contenu de notre travail et de nos responsabilités ont été chamboulés par l’imprévu permanent. La crise économique et sociale s’ajoute à la crise sanitaire : en 2020, les offres d’emploi de cadres ont chuté de 40%, un plongeon inédit. Dans le même temps, la majorité des entreprises du Cac 40 ont continué à verser des dividendes à leurs actionnaires. Le sens de notre travail, de nos modes de vie, le fonctionnement de nos sociétés sont interrogés en profondeur. Nous ne nous pensions pas si fragiles. Avant cela, qui aurait imaginé qu’un virus puisse mettre à l’arrêt l’économie mondiale ?

L’arrivée du vaccin permet, s’il est déployé assez vite, d’entrevoir le bout du tunnel, mais les conséquences économiques et sociales s’annoncent violentes et nous savons que si nous n’infléchissons pas en profondeur notre mode de développement, des crises encore plus graves, notamment environnementales, se produiront.

Le COVID est donc une alerte salutaire…pour peu qu’elle soit entendue…

Les résistances sont fortes, très fortes. Comme après la crise financière de 2008, les classes dirigeantes s’accrochent à leurs privilèges et veulent surtout ne rien changer. Le fossé entre d’un côté les promesses de « monde d’après », et, de l’autre, les actes est choquant. Salarié.e.s en responsabilité, nous n’en pouvons plus des mots creux, du management marketing et des engagements de papier glacé. Pas question que 2021 ressemble au monde d’avant en pire. Nous voulons de la cohérence. Les leçons doivent être tirées. Nous voulons vivre et travailler autrement.  

L’importance des politiques de prévention et de recherche

Pourtant, nous le vivons au quotidien dans notre travail, la prévention est sacrifiée sur l’autel des objectifs financiers de court terme, sur la gestion à flux tendus.

Pourquoi avons-nous en France été obligés de mettre en place des confinements stricts ? Parce que depuis 20 ans, ce sont 100 000 lits qui ont été supprimés dans les hôpitaux. Pourquoi n’y a -t-il pas encore de vaccin développé par un laboratoire français ? Parce que Sanofi, notre champion tricolore, a supprimé la moitié de ses emplois de chercheurs depuis 10 ans tout en distribuant des milliards à ses actionnaires.

Faire primer la prévention, c’est transformer notre travail : garantir la liberté d’expression de l’encadrement pour que les alertes puissent être exprimées et prises en compte. S’il y a un an les médecins lanceurs d’alerte de Wuhan avaient été entendus, le Covid n’aurait peut-être pas passé les frontières chinoises…

Faire primer la prévention, c’est y appliquer le « quoi qu’il en coûte ». C’est cesser de présenter nos services publics comme des coûts alors qu’il s’agit de leviers pour empêcher les crises ou limiter leur impact. C’est investir dans le secteur du soin et du lien aux autres, secteur central pour le bien-être et la résilience de nos sociétés. C’est garantir une prise en charge digne pour nos aînés et nos enfants et favoriser ainsi l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Une pandémie qui offre une bonne leçon de solidarité.

Nos destins sont liés. Pour éradiquer le virus, il faut que l’ensemble de la population puisse se faire dépister, puisse s’isoler et se soigner, faute de quoi de nouveaux foyers de contamination seront créés.

Ceci confirme la nécessité de systèmes de santé et de protection sociale de haut niveau, accessibles quels que soient le revenu et la nationalité. Ceci confirme également l’urgence de résorber les inégalités au plan mondial.

Alors que la pauvreté explose, il est indispensable de garantir l’accès à toutes et tous aux allocations chômage dont la moitié des privés d’emploi sont exclus aujourd’hui.

Ironie de l’histoire, juste avant le confinement, nous étions mobilisés contre une réforme des retraites qui visait à la mise en place d’un pilotage automatique. Une réforme soit-disant technique, qui avait en fait pour conséquence d’organiser l’effondrement de nos pensions, en cas d’augmentation du nombre de retraités ou de récession, et de renvoyer les cadres à des systèmes de capitalisation individuels.

Le risque de récession était présenté à l’époque par le gouvernement comme improbable…il s’est justement produit cette année :

en 2020, le PIB a baissé en France de prêt de 10%…Avec la réforme Macron, nos pensions auraient chuté d’autant.

Notre mobilisation a permis de renvoyer ce projet dangereux aux calendes grecques, la vigilance s’impose car la dette Covid est déjà instrumentalisée

Le besoin d’un État stratège

Nous ne pouvons pas laisser nos vies à la merci de la loi du marché.

Pourquoi n’avions-nous plus de masques ? Parce que leur gestion a été transférée aux hôpitaux, qui n’avaient évidemment pas les moyens de renouveler le stock. Pourquoi avons-nous mis de longs mois à réussir à nous équiper ? Parce que les entreprises qui les produisaient en France ont plié bagage et sont allées, comme l’essentiel de notre industrie, s’installer dans des pays à bas coûts. Pourquoi les plans de licenciements s’amoncèlent-ils malgré les centaines de milliards d’euros d’aides publiques ? Parce qu’elles sont déversées sur les entreprises sans aucune contrepartie et sont d’abord captées par les multinationales.

Pourtant, ces aides d’une ampleur inédites sont un levier central pour transformer notre appareil productif : les conditionner aux politiques sociales et environnementales permettrait de relocaliser l’emploi en France, de reconstruire des filières industrielles stratégiques et de décarboner l’économie.

Ne laissons pas le scénario de la crise financière de 2008 se reproduire : les banques ont été sauvées sans réformer leurs pratiques, la dette privée a été transformée en dette publique…que nous avons ensuite été sommés de payer.

Faire payer la dette Covid au monde du travail serait injuste et inefficace.

Cela nous enfermerait dans la récession, à l’image de ce qui s’est passé en Grèce ou en Espagne par exemple. À l’inverse, la CGT comme de nombreux économistes plaident pour une restructuration de la dette. Alors que l’euphorie domine sur les marchés financiers, il faut réformer la fiscalité pour mettre à contribution le capital et les GAFAM et conditionner les prêts de la Banque Centrale Européenne pour empêcher la spéculation sur la dette.

Construire un Etat stratège, c’est se donner les moyens de décider collectivement de notre avenir face aux transformations numériques qui s’accélèrent et au défi environnemental qui n’a jamais été aussi pressant. 

Des perspectives de luttes victorieuses

Alors oui, les résistances sont très fortes. Mais nous pouvons nous appuyer sur les luttes qui se multiplient malgré la crise sanitaire et forcent l’exécutif à revoir sa copie. Celle pour les libertés, lancée par les journalistes pour défendre leur éthique professionnelle et le droit d’informer. Celle des soignant.e.s et des salarié.e.s du secteur social et médico-social. Celle du monde de la culture, des salarié.e.s de l’énergie contre le démantèlement d’EDF…

Et aussi, en France comme dans le monde, les mobilisations féministes et anti-racistes qui ont fait mordre la poussière à Donald Trump aux Etats-Unis ou encore arraché la légalisation de l’IVG en Argentine !

Soyons lucides : en 2021, la tentation de s’en remettre à des hommes providentiels va encore jouer à plein, l’invocation de lendemains qui chantent servira encore à dissimuler les petits matins.

Nous savons que notre force tient au contraire en notre nombre, mais aussi en l’utilisation de notre qualification et de nos responsabilités. Nous avons, par notre travail, accès à des informations et des leviers qui peuvent nous permettre d’infléchir le cours des choses. Nous voulons gagner un plein exercice de notre professionnalisme, nous voulons pouvoir être « professionnellement engagés et socialement responsables ».

En 2020 la CGT a arraché un accord interprofessionnel renforçant la définition collective du statut cadre, l’ANI encadrement, malgré le blocage du patronat qui voulait pouvoir choisir « ses » cadres.  Une preuve de l’efficacité de l’action collective. Il nous faut aller beaucoup plus loin et rompre l’isolement dans lequel nous enferme le Wall Street management. Ce sera l’objet du prochain congrès de la CGT des ingés, cadres et professions intermédiaires, qui se tiendra en novembre 2021 à Rennes et auquel chacune et chacun d’entre vous est invité à contribuer. 

Nous ne resterons pas comme le lapin tétanisé dans les phares de la voiture. Si 2020 a parfois été dominée par la sidération, ensemble, nous ferons de 2021 l’année de l’action. Meilleurs vœux à toutes et tous.

Partagez cette video et réagissez dans les commentaires, nous lirons toutes vos remarques, et elles nous serviront dans les luttes à venir

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3 réactions

  1. Si je pouvais partager à plusieurs millions de personnes je le ferais, tellement je suis convaincu que répondre à la crise capitaliste pour commencer à nous sortir de ce Covid si salutaire est la la seule réponse de fond. C’est une austérité permanente qui nous attend si nous restons enfermé-e-s dans leurs mensonges permanent et leurs caisses soit disant vides.

  2. Pourquoi dans notre culture, FRANCAISE (!) la mobilisation est-elle si frileuse ? car elle l’est ,, de toute évidence et quel qu’en soit les raisons. Que les 16 et 23 janvier soient MUETS., plein de bouches qui se taisent et dont les cerveaux sont tous pleins de CRIS.
    J’ai “vu” le poids du silence dans certaines mobilisations : c’est d’une puissance qu’aucune parole ne peut atteindre.
    Ce silence force au respect, à la lecture des pancartes, des banderoles, des symboles.
    Je tiendrai une croix blanche sur laquelle sera écrit MON METIER, que, à cause de toutes ces mesures liberticides,
    moi et d’autres ne pouvons plus pratiquer normalement.
    Sais tu seulement ce que ça fait ? le matin, le midi, le soir, des fois ça fait la mort.

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