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Décryptage des dispositions de « rachat de RTT » votées dans le cadre de l’examen de loi de finances rectificatives pour l’année 2022.
Aujourd’hui les cadres et professions intermédiaires travaillent bien plus que 35 heures par semaine. En 2021, les cadres travaillant à temps complet, atteignent presque les 1800 heures de travail annuel. Leurs heures supplémentaires sont également moins prises en compte du fait du régime du forfait-jour qui concerne un·e cadre sur deux, et de l’absence de rémunération ou de récupération des heures supplémentaires soulignée par plus d’un tiers des professions techniciennes et intermédiaires.
La durée du travail des cadres et professions intermédiaires ne diminue pas et figure parmi les plus élevées d’Europe.
L’article 1er E de la loi de finances rectificatives pour 2022 voté à l’Assemblée nationale et au Sénat va aggraver la situation.
Une disposition qui soulève de nombreux problèmes :
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La disposition votée
Contrairement à ce qui peut être présenté dans certains médias, les dispositions de l’article 1er E de la loi de finances rectificatives pour 2022 sont loin d’être un sympathique dispositif de rachat de RTT. Il s’agit de faire baisser le prix du travail et d’accentuer la pression sur les salarié·e·s en poste.
Côté employeurs, ils pourront faire travailler les salarié·e·s plus longtemps en minimisant les majorations de salaire dues et en évitant de recourir à l’embauche.
Côté salarié·e·s, si l’employeur le veut bien la vente d’heures ou de journées de travail au-delà de la durée légale pour un tarif moindre que ce que prévoit actuellement la loi.
L’Ugict-CGT décrypte cet article et les problèmes qu’ils vont poser…
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Les problèmes posés
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Il s’agit d’un contournement des majorations d’heures supplémentaires
Pour la rémunération de ces jours de RTT vendus par les salarié·e·s l’article prévoit une majoration « au moins égale au taux de majoration de la première heure supplémentaire applicable à l’entreprise ». Que ces heures travaillées en plus représentent 7h ou 21h la majoration sera la même. Alors que la loi prévoit que la majoration passe de 25% à 50% à partir de la 9e heure supplémentaire (article L. 3121-36 du code du travail).
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Une personne qui réalise 21 heures supplémentaires |
Une personne qui vend 21 heures (3 JRTT) |
Salaire brut journalier |
95 euros brut |
95 euros brut |
8 premières heures travaillées en plus |
118,75 euros brut |
118,75 euros brut |
Heures suivantes travaillées en plus |
142,5 euros brut |
118,75 euros brut |
Total du prix des heures travaillées en plus |
950 + 1852,5 = 2802,5 euros brut |
2493,75 euros brut |
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C’est l’arbitraire patronal qui décidera
L’article 1er E nous raconte un moment de grâce dans l’entreprise : « le salarié (…) peut, sur sa demande et en accord avec l’employeur, renoncer à tout ou partie des journées ou demi-journées de repos »
On nous fait croire que le ou la salarié·e décide. Or son seul souhait de vendre ses jours de RTT ne suffira pas à le lui permettre car c’est l’employeur qui décide s’il a besoin de son temps de travail. Les besoins de l’entreprise détermineront la possibilité laissée aux salarié·e·s de vendre leurs JRTT.
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Les salarié·e·s en poste seront mis-es sous pression par leurs patrons
Les études nous montrent que les cadres et professions intermédiaires travaillent voient leur charge et leur temps de travail augmenter et que cela s’est aggravé avec le télétravail imposé par la crise sanitaire.
- En 2021, 77% des cadres et 58% des professions intermédiaires déclarent travailler plus de 40 heures par semaine.
- Pour 46,8% des personnes interrogées le temps de travail avait augmenté en télétravail en 2021
Avec cette possibilité offerte au patronat, les employeurs pourront mettre la pression sur les salarié·e·s pour augmenter leur temps de travail, à rebours de leurs aspirations : pour les cadres comme pour les professions techniciennes et intermédiaires l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée constitue la première des priorités.
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Le droit au repos est foulé au pied
Un exemple dans cet article de loi est éclairant, il concerne le contingent annuel d’heures supplémentaires (article L. 3121-30 du code du travail). Ce contingent, quand il est dépassé, donne lieu à des repos supplémentaire. Il est utilisé pour, tout à la fois, protéger la santé des salarié·e·s, et inciter l’employeur à embaucher. Or l’article 1er E écarte complètement ce dispositif (« Les heures correspondantes ne s’imputent pas sur le contingent légal ou conventionnel d’heures supplémentaires »). Les heures en plus sont invisibilisées et ne donneront pas lieu à la contrepartie obligatoire en repos.
C’est donc une disposition qui va à l’encontre de ce qu’il faut mettre en œuvre pour protéger la santé des salarié-e-s (cf. article L. 4121-1 du code du travail), augmenter durablement les salaires et permettre de nouvelles embauches. Bref, tout le contraire de ce qu’il faut faire.
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Les représentant·e·s des salarié-e-s sont complètement ignoré·e·s
La durée du travail au plan collectif et individuel relève habituellement de la discussion avec les représentant·e·s du personnel car c’est un élément fondamental de la relation de travail, il est scandaleux de constater que les syndicats et les comités sociaux et économiques (CSE) ont été écartés pour la mise en œuvre de ce dispositif. Ici c’est la loi qui déroge à toute la règlementation légale ou conventionnelle sans prendre la précaution d’une concertation avec les organisations syndicales représentatives (article L. 1 du code du travail). Alors que le code du travail prévoit que le niveau de majoration des heures supplémentaires est normalement déterminé par accord, et que le CSE rend obligatoirement un avis sur le dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires (article L. 3121-33 du code du travail).
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Les finances publiques sont mises à mal
Il est enfin absolument regrettable de constater qu’encore une fois les caisses de la sécurité sociale et de l’Etat sont privées de revenus sans que le gouvernement n’envisage de compensation. Ce n’est qu’au Sénat qu’il a été décidé qu’une taxe sur le tabac financerait les exonérations de cotisations sociales consenties au patronat.
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Un autre modèle de société est possible
Alors que ce dispositif remet en cause les protections dont bénéficient les salarié·e·s en matière de durée du travail, et que le nombre de burn out et de maladies liées au surtravail explosent, le député « Renaissance » Marc FERRACI a indiqué que le gouvernement souhaite « permettre une réflexion et une concertation sur un dispositif encore plus ambitieux ». Le message est clair : le gouvernement et le MEDEF veulent continuer à détricoter les 35 heures.
A l’Ugict-CGT nous voulons :
- Le respect des 35 heures hebdomadaires pour les cadres et professions intermédiaires : chaque heure doit être décomptée et rémunérée.
- La baisse du temps de travail pour tou·te·s, pour la conciliation vie professionnelle/vie privée, l’environnement et l’emploi.
- La hausse des retraites et des salaires, avec la réinstauration de l’échelle mobile des salaires .