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Parce qu’Emmanuel Macron est privé d’une majorité absolue à l’Assemblée, les commentaires sont allés bon train depuis les résultats des législatives et certains se sont risqués à parier sur un enterrement définitif de la réforme des retraites. Mais c’était sans compter sur la volonté du chef de l’État de mener à son terme ce chantier mis entre parenthèses par la puissante mobilisation sociale et par la pandémie. Ainsi, Emmanuel Macron a-t-il confirmé dans un entretien à l’AFP que la réforme des retraites reste à l’agenda. Il annonce que « les transformations à venir ne seront financées ni par plus d’impôts, ni par plus de dette, mais par davantage de travail et de capacité à créer de la richesse dans notre pays. Ceci emporte deux grandes réformes que nous devons conduire dans la concertation, sans totem ni tabou, mais en gardant un cap d’ambition : la réforme vers le plein emploi (…), mais aussi travailler plus longtemps comme le font tous nos voisins en tenant compte des conditions de travail et donc des règles de pénibilité, en prenant en compte les carrières longues, mais en actant que nous ne pouvons pas avoir un des modèles les plus généreux des pays développés en étant l’un de ceux qui a le taux de départ le plus précoce à la retraite ».
Incorrigible… Alors qu’il a été une fois encore élu par défaut pour faire barrage à l’extrême droite, Emmanuel Macron s’estime à nouveau légitime et fondé à conduire cette réforme. « Ma responsabilité et mon rôle sont premièrement d’être fidèle aux engagements que j’ai pris devant les Françaises et les Français au mois d’avril, c’est le mandat qu’ils m’ont donné ». S’il annonce une fois encore un changement de méthode auquel on n’est pas obligé de souscrire ou de croire, le chef de l’État est donc prêt à prendre le risque d’une nouvelle confrontation sociale à laquelle il n’échappera pas sur ce sujet hautement inflammable. D’autant plus que l’arc syndical contre le recul de l’âge de la retraite à 65 ans s’annonce plus large. Ainsi, le secrétaire général de la CFDT a mis en garde « remettre de la conflictualité sociale très élevée, parce que cette réforme de retraite à 65 ans serait totalement injuste, ce serait pure folie ».
Pure folie, sans doute, mais surtout pure idéologie néolibérale. En effet, si Emmanuel Macron et Élisabeth Borne veulent remettre la réforme sur ses rails alors que sept Français.es sur dix sont opposé.es à un nouveau report de l’âge de la retraite et que le Conseil d’orientation des retraites estime que la situation financière du système de retraites n’est pas amenée à se dégrader, c’est que l’enjeu financier est trop stratégique. Les banques et les assurances ne renoncent pas à mettre la main sur les 14 % de PIB qui, grâce à nos cotisations, financent les retraites par répartition et échappent encore à la spéculation. Et ils n’ont pas renoncé à faire chuter le montant des pensions pour contraindre celles et ceux qui en ont les moyens de se tourner vers l’épargne retraite, la capitalisation. En effet, comme le martèle la CGT des ingés, cadres et techniciens, « reporter encore l’âge de départ n’augmentera pas l’emploi de seniors, mais fera chuter les pensions qui sont déjà̀ de plus en plus faibles du fait des précédentes réformes. Ainsi, pour un ou une cadre du privé, la pension totale représentait 72 % de son salaire de fin de carrière dans les années 1980, aujourd’hui elle n’est plus que de 67,2 %, et ne représentera plus que 51 % en 2062 s’il n’y a pas de nouvelle réforme ».
Purement idéologique, cette réforme néolibérale est aussi un non-sens social et sociétal. « Plus que jamais la retraite à 60 ans est un marqueur d’une société juste et solidaire et doit être entendu par le gouvernement », estime la CGT.
Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT
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