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En proclamant que la lutte contre le Covid est une guerre, en rebaptisant pompeusement des conseils interministériels en « conseil de défense » dont les débats et les décisions sont opaques et sans appel, en qualifiant les travailleuses et travailleurs essentiels de « première ligne » ou de « seconde ligne », Emmanuel Macron a cherché à imposer une rhétorique martiale et une image de chef de guerre à la tête de ses troupes.
Une guerre menée au son du clairon des communicants, mais une guerre d’abord menée sans armes avec la lamentable comédie des masques, puis la pantalonnade des tests, et maintenant un assaut mené tambour battant grâce à deux vaccins… dont on nous dit déjà qu’ils viendraient à manquer. La campagne de vaccination ridiculement poussive à son démarrage, s’est muée ces derniers jours en parcours du combattant pour les plus de 75 ans autonomes qui devraient pouvoir se faire vacciner dès le 18 janvier.
Attente interminable et décourageante au téléphone, serveurs informatiques saturés, rendez-vous dans un mois, quand ce n’est pas dans des centres de vaccination éloignés de parfois 100 kilomètres en régions… l’offensive vaccinale tourne à la comédie. Et l’exécutif de nous expliquer encore et toujours que nous faisons mieux que tout le monde. Or, samedi soir alors que les citoyens étaient claquemurés chez eux à 18 heures, seulement 413 046 personnes avaient pu être vaccinées en France. L’Espagne où déjà 768 000 doses du vaccin ont été administrées, a commencé la deuxième injection, trois semaines après les premières. En Italie, plus d’un million de doses ont été administrées. Et outre-Manche on vaccine déjà plus qu’en France.
Ces ratés à l’allumage nous révèlent chaque fois les limites, les impasses de la politique du gouvernement. Depuis bientôt une année, nous allons de pénuries en saturation. Nous payons cher l’asphyxie budgétaire dans laquelle les hôpitaux ont été plongés et qui va se poursuivre. Car de nouveau en 2021 les établissements devront faire des économies. C’est bien parce que notre système de santé a été mis à mal que nous avons été -et que nous sommes encore- privés de liberté, de culture, de sport, de relations sociales. Contraints à travailler et rien d’autre.
S’agissant de la vaccination, cette crise nous révèle que les grands laboratoires comme Sanofi ont été pris de cours parce que depuis des années, le gouvernement a laissé ses actionnaires tout miser sur quelques traitements potentiellement à forte valeur ajoutée au détriment des recherches notamment sur les vaccins. « Guérir », plutôt que prévenir, c’est décidément plus rentable. Cette pénurie de vaccins à laquelle on commence à préparer les esprits devrait faire réfléchir et remettre en cause l’absence de pilotage et de gouvernance publique dans un domaine aussi crucial que la santé publique.
Emmanuel Macron prétendait en mars dernier tirer les leçons de la pandémie pour notre système de santé. Alors que la France connaissait une pénurie surréaliste de masques et de paracétamol, il disait en substance que notre santé ne pouvait pas être aux seules mains du marché. On voit à quel point l’enjeu va bien au-delà de la relocalisation des fabrications de principes actifs et de matériels indispensables. C’est tout un écosystème de santé qu’il faut rebâtir. Réinvestir dans la recherche publique, faire tomber dans le domaine public les brevets indispensables, redonner du souffle à l’hôpital, aux soignants, aux professions médicosociales. Lesquels seront à nouveau dans la rue le 21 janvier pour revendiquer des moyens, de meilleures conditions de travail, une reconnaissance salariale, des moyens humains.
Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT
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