Conférence sociale : les priorités de l’Ugict-CGT (partie 2/2)

Pour en savoir plus


Temps de lecture : 7 minutes

Quelles suites donner à la conférence sociale sur les salaires ? 5 priorités pour l’Ugict-CGT

On peut d’abord noter que le gouvernement et le patronat ont été obligés de répondre aux sujets qui ont été mis à l’ordre du jour par la CGT et par les salarié·es, notamment dans le cadre du mouvement historique contre la réforme des retraites. Nous pouvons continuer à donner de l’ampleur à ces thèmes pour gagner des hausses générales de salaire. 

Sommaire :

1  Continuer à s’organiser pour gagner l’indexation des salaires sur le Smic et les prix

2  Poursuivre la lutte pour les salaires sur nos lieux de travail

3  Donner la priorité aux salaires sur les “dispositifs de partage de la valeur” 

4  Obtenir le conditionnement des aides publiques devient impératif 

5  Mettre la bataille de l’égalité au centre des enjeux salariaux

1  Continuer à s’organiser pour gagner l’indexation des salaires sur le Smic et les prix

La CGT revendique l’échelle mobile des salaires, c’est-à-dire l’indexation de tous les salaires – y compris ceux des ingés, cadres et techs – sur le Smic et les prix. Ce dispositif qui existait en France jusque dans les années 1980 permet aux salarié·es de ne pas perdre de pouvoir d’achat en période d’inflation.

L’échelle mobile des salaires n’empêche pas la négociation de branches et d’entreprises sur les salaires. Elle crée juste un mécanisme qui protège les salarié·es contre la perte de pouvoir d’achat. Le gouvernement est par ailleurs hypocrite : non seulement il ne veut pas prendre de mesure pour imposer l’échelle mobile des salaires, mais il refuse de modifier la loi pour permettre de l’autoriser par la négociation. L’article L. 3231-3 du code du travail interdit explicitement l’indexation des salaires sur le Smic. Cet article doit être réécrit pour permettre aux organisations syndicales et patronales de la négocier ! Des branches et des entreprises négocient de toute façon déjà sur cette base. C’est le cas dans le textile, par exemple.

 

Parmi les victoires de la conférence sociale sur le sujet il faut noter :

    • Que de plus en plus d’organisations défendent l’échelle mobile des salaires : c’est notamment le cas de FO et de Solidaires qui l’ont indiqué en séance plénière et de la CFE-CGC qui l’a indiqué en atelier, comme la CFTC et l’UNSA qui l’ont proposée a minima pour les premiers échelons des grilles. 
    • Que le gouvernement a été contraint de se positionner sur cette proposition, que nous avons remise au cœur du débat public dès le début de l’année 2022. 

  • Que le MEDEF en est réduit à mentir sur les politiques salariales mises en œuvre dans les entreprises. Comment les entreprises pourraient-elles avoir négocié des “niveaux de revalorisation des rémunérations particulièrement significatifs, à hauteur de l’inflation” alors que les ingés, cadres et techs finissent l’année avec un salaire qui diminue en euros constants (pouvoir d’achat) ?

 

 

La bataille de l’opinion continue sur cette mesure : 82 % des cadres soutiennent l’indexation des salaires sur le Smic et les prix (baromètre Ugict/ViaVoice 2023). 

Plusieurs propositions de loi ont été déposées sur ce thème au Parlement, nous pouvons pousser pour qu’elles soient adoptées.

 

2  Poursuivre la lutte pour les salaires sur nos lieux de travail

Les employeurs privés ont l’obligation d’ouvrir des négociations annuelles sur les salaires dès que l’entreprise dépasse les 50 salarié·es. Or toutes les entreprises ne le font pas : en 2017 seuls 39 % des représentant·es des directions et 40 % des représentant·es du personnel déclaraient qu’une négociation salariale avait été ouverte l’année précédente dans leur entreprise (Pelisse, Blavier, 2021). 

Quand les employeurs ouvrent des négociations, ils ne proposent aujourd’hui que des hausses de salaire insuffisantes au regard de l’inflation et des profits générés par les ingés, cadres et techs de leurs entreprises. 

 

 La mobilisation des salarié·es sur les salaires est payante. Lorsqu’ils et elles “se donnent des prises collectives sur les décisions d’augmenter les salaires en se mobilisant, l’action collective paie : la direction, dans 65 % des cas, déclare avoir changé sa décision [dans un sens favorable aux salarié·es] lorsque la mobilisation s’est tenue avant ou pendant la négociation” (entretien de Jérôme Pelisse dans le journal Options n°675). 

C’est le cas chez Accenture où les syndicats ont appelé à la première grève de leur histoire pour réclamer des hausses collectives de salaires de 6 % alors que l’employeur en propose 0 et augmente en parallèle de 15 % la rémunération des actionnaires. 

 

3  Donner la priorité aux salaires sur les “dispositifs de partage de la valeur” 

La CGT revendique des hausses de salaires en priorité sur les “dispositifs de partage de la valeur” comme les primes, l’intéressement et la participation. Pourquoi ? Parce que les primes se substituent de plus en plus aux augmentations de salaire. C’est ce qu’a indiqué le Conseil d’analyse économique dans une note du 18 juillet 2023 : « L’intéressement et la prime de partage de la valeur sont plus propices à la substitution étant donné leur plus grande souplesse et le caractère volontaire de leur implémentation. »  Le CAE précise que « l’adoption [de ces dispositifs facultatifs] n’entraîne aucune hausse significative de la rémunération totale des salariés, ce qui implique une substitution quasi complète entre salaires et dispositifs de partage de la valeur » et que « la rémunération moyenne des salariés (salaires + dispositifs de partage de la VA), qui était en croissance avant l’adoption, se stabilise après l’adoption. » 

 

Cette substitution des primes et de l’intéressement sur les hausses de salaire est d’autant plus vraie pour les ingés, cadres et professions techniciennes et intermédiaires qui sont la plupart du temps renvoyé·es à des modes de rémunération individuels et non collectifs (augmentations individuelles ou primes plutôt qu’augmentation collective). 

Or les primes à la performance sont particulièrement discriminantes pour les femmes cadres car elles valorisent un niveau de présentéisme inatteignable au vu de leurs responsabilités familiales (elles assument 80 % des tâches domestiques, Insee, 2010). 

 

 

Le fait que les primes remplacent petit à petit le salaire a en outre des conséquences catastrophiques sur les finances publiques et le financement de la Sécurité sociale. Comme l’intéressement, la prime « de partage de la valeur » (PPV), ou “Prime Macron”, n’est pas assujettie aux cotisations sociales, c’est-à-dire la part du salaire qui est socialisée et retenue pour financer la Sécurité sociale et les retraites. Cette exonération comme les autres n’est, en réalité, qu’une baisse de salaire.

La majorité des organisations syndicales présentes dans l’atelier sur les salaires ont exprimé l’idée que les primes ne doivent pas se substituer aux hausses de salaires. La CGT a défendu l’idée que les “dispositifs de partage de la valeur” (primes, intéressement, participation) soient tous soumis à cotisations sociales pour neutraliser les effets de substitution et abonder les caisses de la Sécurité sociale. 

 

Dans les entreprises les cadres et les professions intermédiaires préfèrent elles et eux aussi les augmentations générales de salaires aux primes : 

4  Obtenir le conditionnement des aides publiques devient impératif 

C’est à la CGT que revient le crédit d’avoir aidé à mettre en lumière les centaines de milliards d’euros d’argent public qui sont versés chaque année aux entreprises sans contrôle ni contrepartie (rapport IRES “Un capitalisme sous perfusion”, 2022). Toutes les organisations syndicales sont désormais convaincues par la nécessité de conditionner les aides publiques. 

Les ingés, cadres et professions intermédiaires et techniciennes sont les témoins direct·es de ces choix publics qui ne répondent à aucun objectif d’intérêt général : 

  • Dans le secteur privé les ingés, cadres et techs constatent les montants qui sont versés à leurs entreprises sans qu’ils ne soient véritablement investis dans des politiques sérieuses de recherche et développement au service du bien commun. C’est le cas par exemple des 7 milliards d’euros du crédit impôt recherche (CIR). Pour l’Ugict-CGT, les aides publiques à la recherche privée doivent être limitées en montant, définies démocratiquement, strictement contrôlées et impérativement conditionnées à un développement effectif des activités de recherche et de l’emploi scientifique.
  • Dans le secteur public, vidé de ses financements, les agent·es (de l’hôpital, de l’école, des collectivités, etc.) déplorent l’impossibilité de “bien travailler” dans le contexte de pénurie de moyens.

Dans les entreprises nous pouvons faire la transparence sur les aides publiques et leur utilisation en partageant avec les salarié·es le contenu de la base de données économique, sociale et environnementale (BDESE) consacrée aux aides publiques.

 

5  Mettre la bataille de l’égalité au centre des enjeux salariaux

La CGT a gagné le traitement “à part” de la question de l’égalité professionnelle dans le cadre de la Conférence sociale. Cela était essentiel, car quand le gouvernement et le patronat s’engagent à traiter ce sujet de façon “transversale” c’est généralement qu’il ne sera pas, ou bien qu’il sera mal traité. 

La refonte de l’index egalité professionnelle est un premier pas, mais l’échéance de 2025 annoncée par le gouvernement est beaucoup trop tardive alors que de nombreuses études ont mis en lumière la faiblesse voire les effets néfastes de cet outil. 

En outre, le gouvernement ne s’est pas engagé sur la question des violences sexistes et sexuelles auxquelles sont exposées les femmes qui travaillent. 

  • 43 % des professions intermédiaires et 31 % des cadres disent qu’il n’y a pas de mesure de prévention des violences sexistes et sexuelles sur leur lieu de travail. 
  • 10 % des professions intermédiaires et 14 % des cadres disent avoir été témoins ou victimes de faits de violences sexistes et sexuelles sur leur lieu de travail. Parmi ces personnes, plus de 60 % disent que l’auteur des faits a été sanctionné par l’entreprise ! (Baromètre Cadres 2023

Nous pouvons mener la bataille de l’égalité professionnelle dans nos entreprises et nos administrations. La CGT propose des guides pour négocier des accords sur l’égalité professionnelle et gagner des politiques de prévention des violences sexistes et sexuelles. 

Le 25 novembre 2023 la CGT appelle à se mobiliser dans les manifestations partout en France à l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes.  

Pour gagner sur ces différents plans nous pouvons renforcer la CGT en présentant des listes Ugict-CGT aux élections, en votant et en faisant voter CGT dans toutes les entreprises !

Pour avoir du poids dans les entreprises et les branches, la CGT a besoin de votre soutien. Lors des élections dans les comités sociaux et économiques (CSE) vous pouvez l’exprimer :

  • En vous présentant sur des listes Ugict-CGT dans votre entreprise
  • En votant pour les candidat·es CGT et Ugict aux élections professionnelles.

Restez informés


À propos

Voir aussi

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *