[Podcast Ép. 96] Billet 🔊 – Trêve des confiseurs ou veillée d’armes ?

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Il n’est pas certain que les chantres de la réforme des retraites se mettent en pause durant la trêve des confiseurs. Ainsi le patron des patrons s’est fendu d’un entretien au JDD ce week-end pour exhorter l’exécutif à trancher. « Qu’elle soit présentée en décembre ou en janvier, peu importe. À un moment donné, c’est au politique, élu sur un programme, de trancher. Ne pas la faire, c’est reculer pour mieux sauter », martèle Geoffroy Roux de Bézieux.

 

Le président du Medef feint-il d’oublier qu’Emmanuel Macron a été élu par défaut pour écarter Marine Le Pen… pas pour porter l’âge de la retraite à 65 ans ? Son élection, suivie de législatives qui le privent d’une majorité absolue pour ce second mandat ne démontrent absolument pas une adhésion à cette réforme. Le patron des patrons reste néanmoins lucide face à la bataille sociale qui s’annonce dès janvier : « ce n’est pas parce qu’il y aura des conflits sociaux importants qu’il faudra renoncer à une réforme indispensable. »

Le leader patronal a raison : il y aura des conflits sociaux importants. Et cette période de fêtes de fin d’année ressemble bien à une veillée d’armes. Les syndicats, dans une unanimité peu commune, ont prévenu l’exécutif du risque qu’il prend « en s’entêtant » à imposer une réforme qui va à rebours des aspirations sociales et sociétales, qui braque toutes les forces sociales et qui ne répond à aucune nécessité économique « car le système par répartition n’est pas en danger, y compris pour les jeunes générations », assurent-ils.

Face au conflit social majeur qui s’annonce, le report au 10 janvier des annonces que la Première ministre devait faire le 15 décembre pourrait apparaître comme une nouvelle hésitation. Mais il faut se méfier des apparences. La partition gouvernementale n’a pas changé. Emmanuel Macron se cherche une majorité avec la droite pour faire adopter sa réforme. D’ailleurs, le ministre du Travail Olivier Dussopt a récapitulé le 15 décembre quelques pistes déjà retenues. Et s’il n’a pas annoncé de décision sur la mesure d’âge 65 ou 64 ans, il a cependant prévenu qu’il serait nécessaire de “travailler plus longtemps pour assurer la pérennité financière du système”. Et, sans surprise, il a évoqué le report de l’âge légal à 65 ans ou à 64 ans en accélérant la réforme Touraine qui consiste à allonger la durée de cotisation d’un trimestre toutes les trois générations pour obtenir une retraite à taux plein.

Si la mobilisation sociale a permis de mettre en échec la partie systémique de la réforme des retraites lors du premier quinquennat, la réforme paramétrique à venir n’en reste pas moins extrêmement dangereuse. Elle est dictée comme toutes les réformes qui se sont empilées depuis le Livre Blanc des retraites de Michel Rocard en 1991 par l’exigence des banques et les assurances de mettre la main sur les 14 % de PIB qui, grâce à nos cotisations, financent les retraites par répartition et échappent à la spéculation. Toutes les réformes engagées ont fait chuter le montant des pensions, le taux de remplacement du salaire par la pension.

L’idée est de contraindre celles et ceux qui en ont les moyens de se tourner vers l’épargne retraite, la capitalisation. Et bien entendu, les couches moyennes, les salariés qualifiés et en responsabilité sont une cible de choix. Mais tout indique que ces catégories restent attachées à un système de retraite par répartition, solidaire.

Ainsi, face au « grand déclassement » des professions techniciennes et intermédiaires dénoncé par la CGT de l’encadrement, ces travailleuses et travailleurs se disent déjà majoritairement (54 %) prêts à manifester pour défendre leur retraite. Parmi ces quelques sept millions de salariés (soit 26 % de l’emploi total), le dernier baromètre Ugict-CGT Viavoice indique que huit personnes sur 10 veulent une retraite d’au moins 75 % du salaire de fin de carrière. 65 % veulent une reforme avec un départ à 60 ans et la prise en compte des années d’étude. Et 52 % pensent qu’il faut ponctionner les dividendes pour financer cette réforme.

Comme on le voit dans ce baromètre comme dans les enquêtes d’opinion récentes, Emmanuel Macron n’a pas gagné la bataille de l’opinion. À 10 jours de dégoupiller la réforme, ses vœux du nouvel an rassureront-ils les Français ? Rien n’est moins certain.

 

Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT

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