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On se souvient de la grande passion affichĂ©e par Emmanuel Macron pour Georges ClĂ©menceau, dont il a cru bon d’annexer l’image Ă l’occasion des cĂ©lĂ©brations du centenaire de la fin du premier conflit mondial en 2018.
Ă€ dĂ©faut de s’afficher en « Père la victoire » dans la guerre au virus nanomĂ©trique, le chef de l’État n’hĂ©site pas Ă s’inspirer du Tigre qui disait : « Quand les Ă©vĂ©nements nous dĂ©passent, feignons d’en ĂŞtre les organisateurs. »
 C’est ainsi que mardi 6 avril dernier vers 16 heures, Emmanuel Macron s’est incrustĂ© dans un cours d’histoire-gĂ©ographie de classe virtuelle avec des Ă©lèves de troisième d’un collège des Alpes-de-Haute-Provence. De quoi faire les choux gras des JT le soir mĂŞme et feindre en effet d’avoir la maĂ®trise des choses et d’ĂŞtre le grand ordonnateur de l’Ă©cole Ă la maison. Faire oublier Ă quel point cette première journĂ©e de tĂ©lĂ©travail et de classe Ă la maison avait pu ĂŞtre un nouveau cauchemar pour des milliers de parents.
 Cette première journĂ©e d’enseignement Ă distance pour les Ă©coles, collèges et lycĂ©es a Ă©tĂ© marquĂ©e par des couacs et des plantages qui nous ont replongĂ©s un an en arrière. De nombreux professeurs et leurs Ă©lèves n’ont pu assister au cours comme initialement prĂ©vu, Ă cause d’une sĂ©rie de problèmes informatiques. Les diffĂ©rentes plateformes des espaces numĂ©riques de travail (ENT) sont restĂ©es inaccessibles pendant plusieurs heures. Et les rĂ©seaux sociaux ont Ă©tĂ© la caisse de rĂ©sonance de l’incrĂ©dulitĂ© et de la colère des parents comme des enseignants. « Un an après, ça recommence ! Premier jour de continuitĂ© pĂ©dagogique et l’ENT est inaccessible ! Combien d’Ă©lèves et de familles ont le sentiment de revivre la mĂŞme imprĂ©paration, encore et encore ? », a protestĂ© la FĂ©dĂ©ration des conseils de parents d’Ă©lèves de Paris. Tandis qu’Ă l’heure de faire classe de nombreux profs constataient le plantage des systèmes.
 Et puisque nous sommes en guerre, et qu’il faut bien un ennemi, Jean-Michel Blanquer a accusĂ© des « cyberattaques venues de l’Ă©tranger ». Bien vite contredites par Mediapart, qui Ă©voque une « fable ». Selon ses sources au sein du SecrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral de la dĂ©fense et de la sĂ©curitĂ© nationale (SGDSN), en charge de la surveillance des cybermenaces, « aucune attaque » venue de l’Ă©tranger » envers le site du CNED n’a Ă©tĂ© identifiĂ©e.
 Il semble en revanche que dans cette lamentable affaire, les prestataires sous-traitants de l’Éducation nationale aient Ă©tĂ© dĂ©bordĂ©s. Le principal d’entre eux avançant comme excuse sur France Info « une très forte saturation de nos plateformes liĂ©e Ă un nombre très important de connexions sur une plage horaire très concentrĂ©e ». On venait donc de dĂ©couvrir que des millions d’Ă©lèves et leurs enseignants se mettent en gĂ©nĂ©ral au boulot dès le matin. Un ministre qui raconte des cracs pour masquer un grand couac, un chef de l’État qui fait comme si tout roule… ça pourrait prĂŞter Ă sourire si ce n’Ă©tait pathĂ©tique tant l’accident Ă©tait prĂ©visible.
 Ainsi, le 1er avril la CGT Éduc’Action alertait sans Ă©quivoque : « Il y a dĂ©sormais urgence Ă aider les Ă©quipes dans la mise en place de cette nouvelle phase d’enseignement Ă distance car rien n’a Ă©tĂ© fait depuis un an pour l’anticiper. La fracture numĂ©rique subie par les Ă©lèves (issu.es particulièrement de milieu modeste) n’a Ă©tĂ© ni abordĂ©e, ni rĂ©solue. » Et l’organisation syndicale s’inquiĂ©tait de ce que « rien n’est prĂ©vu pour s’attaquer aux consĂ©quences nĂ©fastes du dĂ©crochage que beaucoup d’élèves vont affronter Ă nouveau. Cette inaction ministĂ©rielle assumĂ©e va une fois de plus fragiliser les Ă©lèves dĂ©jĂ prĂ©carisĂ©.es et c’est inacceptable ».
Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT
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