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Le Medef a présenté un « avant-projet d’accord » en rupture avec les engagements qu’il avait souscrit en signant l’accord du 30 octobre 2015 sur les régimes de retraite complémentaire Agirc et Arrco. Selon l’article 8 de cet accord, cette « négociation nationale et interprofessionnelle » a pour objet « la définition de l’encadrement […] (notamment technique et managérial) ».
Séance du 13 mars 2018
1. LE MEDEF CHANGE L’OBJET DE LA NÉGOCIATION
Tirant prétexte des ordonnances Macron et de la liberté de négociation des branches et des entreprises, il refuse à présent toute définition interprofessionnelle de la notion d’encadrement. Son projet d’accord n’a de caractère que supplétif à d’éventuels accords de branche et ne comporte aucune définition opposable aux entreprises.
Celles-ci, selon leur bon vouloir, définiraient in fine qui relève ou pas de l’encadrement et quels sous-ensembles de l’encadrement pourraient ou pas bénéficier de la prévoyance des cadres et assimilés. En pratique, un ingénieur, un chef de projet, un manager, hier cadres, pourraient ne plus l’être demain selon l’appréciation souveraine et arbitraire des employeurs.
Le paradoxe, c’est que toute la base de mutualisation sur laquelle se fondent les prestations de prévoyance dévolues à l’encadrement se trouverait déséquilibrée, et cela aux dépens des salariés… et même des entreprises !
Les branches se verraient en effet contraintes de renégocier tous leurs accords de prévoyance et les entreprises perdraient le bénéfice des exonérations de cotisations de Sécurité sociale attachées au caractère collectif et obligatoire des garanties de prévoyance (décret du 9 janvier 2012) couvrant les cadres et assimilés cadres, tels que définis par les articles 4 et 4 bis de la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance du 14 mars 1947.
En outre, la proposition du Medef hypothèque l’avenir de l’Apec (association pour l’emploi des cadres) dont le financement n’est plus garanti au mépris de sa mission de service public.
2. REJET UNANIME DES ORGANISATIONS SYNDICALES
L’arbitraire patronal érigé en règle pour définir l’encadrement a cristallisé un rejet unanime des organisations syndicales, qui revendiquent toutes le respect de l’article 8 de l’accord du 30 octobre 2015, fondé sur l’élaboration interprofessionnelle d’une définition de l’encadrement. Toutes les organisations syndicales se sont prononcées en faveur d’un nombre limité de critères transversaux, objectifs et aisément objectivables quelles que soient les branches professionnelles : autonomie, responsabilité et qualification initiale ou acquise par l’expérience.
Récusant toute opposition entre les différents niveaux de la négociation, la CGT et son Ugict ont avancé des propositions permettant de concilier la liberté contractuelle des branches et une définition interprofessionnelle de l’encadrement.
Elle a également rappelé que cette négociation doit permettre d’élaborer un socle de droits et de moyens pour permettre à l’encadrement d’être professionnellement engagé et socialement responsable. Pour mémoire :
- droit d’accès aux informations de l’entreprise ;
- droit d’intervention sur ses orientations ;
- droit de refus, d’alerte et d’alternative sans sanction ;
- droit au décompte du temps de travail, au respect des durées maximum de travail et minimum de repos pour un droit effectif à la déconnexion ;
- droit à une protection sociale garantissant le maintien du niveau de vie en cas de chômage, d’incapacité de travail et lors de la retraite ;
- droit à la mobilité choisie ;
- droit à la propriété des savoirs et savoir-faire (non aux clauses de confidentialité !).
Face à ce front du refus, le Medef s’est montré pessimiste sur sa capacité à obtenir un nouveau mandat avant son prochain congrès. Deux dates de réunion ont donc été retenues (10 avril et 24 mai) sans grande conviction de sa part.