Temps de travail, droit syndical, égalité professionnelle

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Temps de travail, droit syndical, égalité professionnelle
De nouvelles décisions favorables de la jurisprudence. En cette période de régression législative, des succès continuent d’être obtenus devant les juridictions sur différents terrains.

FORFAIT EN JOURS

 

Le contrôle du juge porte de plus en plus sur le contenu des conventions et accords collectifs organisant le recours au forfait en jours.

Un salarié ayant conclu un forfait en jour sollicite une reclassification (avec un important rappel de salaire) : la convention collective applicable prévoit au minimum un coefficient 3.1 pour être classé en forfait en jours, mais il ne bénéficie que du coefficient 2.2. Selon les dispositions conventionnelles applicables, les salariés susceptibles de conclure une convention de forfait en jours doivent obligatoirement disposer d’une grande latitude dans l’organisation de leur travail et dans la gestion de leur temps et doivent également bénéficier de la position 3 de la convention collective (en général les positions 3.2 et 3.3, et dans certains cas 3.1) ou avoir une rémunération annuelle supérieure à deux fois le plafond annuel de la Sécurité sociale ou être mandataire social (convention collective nationale des bureaux d’études techniques, cabinets de conseil et sociétés de conseil, dite Syntec). Pour trancher ce litige, le juge civil, « juge actif », selon la formule employée en Europe continentale, doit se fonder sur la réalité des fonctions occupées par le salarié pour procéder à l’attribution d’un coefficient conforme aux critères conventionnels. Ici, le juge constate que le salarié ne répond pas aux critères lui permettant d’accéder au coefficient 3.1. Le salarié est débouté sur ce point.

« Le salarié qui avait moins de six ans de pratique en qualité de cadre, ne pouvait être classé à la position 3.1, ce dont il se déduisait qu’il n’était pas susceptible de relever du régime du forfait-jour qui lui avait été appliqué ; la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés (1). »

Cependant, comme un poste classifié au coefficient 2.2 n’est pas accessible au forfait en jours, le salarié pourra, devant la cour d’appel de renvoi, demander l’annulation de son forfait en jours et le paiement des heures travaillées au-delà de la durée légale en heures supplémentaires (depuis le début de son contrat de travail, dans la limité de cinq années) et, le cas échéant, des dommages-intérêts pour durées du travail excessives.

Par ailleurs, « le retrait d’un jour de réduction de temps de travail en raison d’une absence pour maladie a pour effet d’entraîner une récupération prohibée » et « les jours d’ancienneté conventionnels doivent être pris en compte pour la détermination du nombre de jours travaillés sur la base duquel est fixé le plafond propre à chaque convention de forfait » (2).

 

INTERNET ET DROIT SYNDICAL

 

M. X…, délégué syndical au sein de la caisse régionale de Crédit maritime mutuel du Finistère, a envoyé, avec son ordinateur et sa messagerie personnels, un tract signé de l’intersyndicale à l’adresse électronique des trente-cinq points de vente des agences du Crédit maritime mutuel en Bretagne. Pour cela, il a fait l’objet d’un avertissement ; il a saisi la justice pour faire annuler cette sanction.

La Cour de cassation considère que cet envoi ne caractérisait pas une diffusion (au sens de l’article L.2142-6 du Code du travail, prévue par accord d’entreprise, sur la messagerie électronique de l’entreprise). Par conséquent, l’avertissement n’était pas licite et doit être annulé (3). Ainsi, même quand il n’existe pas dans l’entreprise d’accord collectif autorisant l’utilisation de la messagerie électronique par les organisations syndicales, la communication d’informations syndicales par voie électronique est possible, à certaines conditions (utilisation de l’ordinateur et de la messagerie personnels notamment).

 

EXPERTISE DU COMITÉ D’ENTREPRISE ET ÉCARTS DE RÉMUNÉRATION ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

 

En matière d’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes, le comité d’entreprise peut se faire assister par son expert-comptable, lors du bilan annuel (examen des comptes de l’année écoulée et des comptes prévisionnels). En effet, les juges considèrent que la mission de l’expert-comptable désigné pour assister le comité porte sur tous les éléments d’ordre économique, financier ou social de l’entreprise nécessaires à la compréhension des comptes et à l’appréciation de la situation de l’entreprise. L’étude de la structure des rémunérations du personnel est une mission destinée à fournir au comité des éléments d’appréciation sur la situation de l’entreprise et permet d’appréhender les éléments d’ordre social nécessaires à l’examen de la masse

salariale et de son évolution.

Ainsi, l’expert-comptable peut assister le CE pour l’étude des rémunérations (montant et structure des rémunérations des salariés, système de rémunération), notamment en ce qui concerne les écarts entre les femmes et les hommes. En revanche, l’expert-comptable ne peut pas être missionné pour une analyse globale de la situation comparée des femmes et des hommes dans l’entreprise (4).

Par conséquent, il convient de tenir compte de cette jurisprudence pour la rédaction de la mission confiée à son expert-comptable par le CE dans le cadre de sa délibération.

 

(1) Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 3 novembre 2011, pourvoi n° 10-14.637, Sté Linedata Services Leasing & Crédit.

(2) Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 3 novembre 2011, pourvoi n° 10-18762.

(3) Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 10 janvier 2012, n° 10-18558.

(4) Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 10 janvier 2012, n° 10-21270, société Cap Gemini Ouest.

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