Pour en savoir plus
Le Code du travail
Le Code du travail reprend les dispositions de la directive européenne n° 2006/54 du 5 juillet 2006 concernant le harcèlement sexuel : « Aucun salarié ne doit subir des faits :
1° soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
2° soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers » (Code du travail, art. L. 1153-1). Concernant le nouveau régime de la preuve du harcèlement sexuel devant le juge civil, « Lorsque survient un litige […] le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. » (Code du travail, art. L. 1154-1).
Concernant les agissements sexistes : « Nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. » (Code du travail, art. L. 1142-2-1).
Le Code pénal (art. 222-33)
I. – Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. L’infraction est également constituée :
1° Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;
2° Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.
II. Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.
III. Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.
Ces peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende lorsque les faits sont commis :
1° Par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ;
2° Sur un mineur de quinze ans ;
3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;
4° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur ;
5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice ;
6° Par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne ou par le biais d’un support numérique ou électronique ;
7° Alors qu’un mineur était présent et y a assisté ;
8° Par un ascendant ou par toute autre personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait.
Le Comité social et économique
Les délégués du personnel au Cse disposent d’un « droit d’alerte » efficace pour rendre effectif le droit à un environne- ment de travail sans harcèlement sexuel. Reprenant les dispositions de la loi du 31 décembre 1992, depuis le 1er janvier 2018, la loi indique : « Si un membre de la délégation du personnel au comité social et économique constate, notamment par l’intermédiaire d’un travailleur, qu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l’employeur. Cette atteinte peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel ou moral ou de toute mesure discriminatoire en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement.
L’employeur procède sans délai à une enquête avec le membre de la délégation du personnel du comité et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.
En cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte, et à défaut de solution trouvée avec l’employeur, le salarié, ou le membre de la délégation du personnel au comité social et économique si le salarié intéressé averti par écrit ne s’y oppose pas, saisit le bureau de jugement du conseil de prud’hommes qui statue selon la forme des référés.
Le juge peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser cette atteinte et assortir sa décision d’une astreinte qui sera liquidée au profit du Trésor. »
À partir du 1er janvier 2019 (au plus tard),
« un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes est désigné par le comité social et économique parmi ses membres, sous la forme d’une résolution […], pour une durée qui prend fin avec celle du mandat des membres élus du comité.» (Code du travail, art. L. 2312-59).
La loi ne prévoit aucun moyen supplémentaire pour ce délégué « référent » par rapport aux autres délégués du Cse. Il doit, comme les autres délégués au Cse, bénéficier de la formation nécessaire à l’exercice de ses missions (Code du tra- vail, art. L. 2315-18).
Aucune sanction n’est prévue en cas d’absence de désignation.
L’Employeur
L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d’y mettre un terme et de les sanctionner.
Dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche, les personnes (salarié, per- sonne en formation ou en stage, candidat à un recrutement, à un stage ou à une formation en entreprise) sont informées par tout moyen du texte de l’article 222- 33 du Code pénal (supra) ainsi que des actions contentieuses civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel et des coordonnées des autorités et services compétents. La liste de ces services est définie par décret. (Code du travail, art. L. 1153-5).
À partir du 1er janvier 2019 (au plus tard), « dans toute entreprise employant au moins deux cent cinquante salariés est désigné un référent chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes » (Code du travail, art. L. 1153-5-1).
Ce référent est désigné par l’employeur. La loi ne prévoit aucun statut, aucune protection, ni aucun moyen pour ce salarié « référent »… Aucune sanction n’est prévue en cas d’absence de désignation…
Le Juge
Au sein d’une jurisprudence qui devient abondante, deux arrêts rendus en 2017 donnant gain de cause à une salariée sont à signaler. Chacun de ces deux arrêts, reçus par le juge civil (conseil de prud’hommes, cour d’appel, chambre sociale de la Cour de cassation) apporte des formulations innovantes importantes pour la prévention et, le cas échéant en cas d’insuffisance de la prévention pour la réparation :
– « un fait unique peut suffire à caractériser le harcèlement sexuel » (Cour de cassation, chambre sociale, 17 mai 2017, N° de pourvoi 15-19300, l’Inter-association parents et amis des scouts). Dans cette affaire, « le président de l’association avait “conseillé” à la salariée qui se plaignait de coups de soleil de “dormir avec lui dans sa chambre”, “ce qui lui permettrait de lui faire du bien” […] ». La salariée peut obtenir des dommages-intérêts de la part du salarié harceleur et de la part de l’entreprise (les deux se cumulent). La salariée obtient la requalification de sa démission en licenciement nul.
– « Le harcèlement sexuel peut consister en un harcèlement environnemental ou d’ambiance, où, sans être directement visée, la victime subit les provocations et blagues obscènes ou vulgaires […]. » (cour d’appel d’Orléans, chambre sociale, 7 février 2017, n° 15/02566. SA La Nouvelle République du Centre-Ouest). Dans cette affaire, selon l’arrêt, « le harcèlement sexuel est établi ». Ce harcèlement sexuel était constitué par des « propos sexistes, orduriers et outrageants de la part de ses collègues, des affichages de photographies à connotation sexuelle sur les ordinateurs et sur un mur de l’“open space”. »
Pour le juge, il résulte du Code du travail que « l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité […] en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, manque à cette obligation lorsqu’un salarié est victime sur le lieu de travail d’agissements de harcèlement […] sexuel exercés par l’un ou l’autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements. C’est le cas en l’espèce. » L’employeur n’a pas satisfait à son obligation de sécurité, « ce qui a conduit à ce que se poursuive le harcèlement sexuel dont se plaignait la salariée. »