Pour en savoir plus
Les faits : M. X… a été engagé en qualité de chef de cuisine par la société Bussy-Saint-Georges Marne-la-Vallée à compter du 12 avril 2011 ; le fonds de cette société a été cédé à la société Dg Résidences, reprise par la société Dg Urbans à compter du 10 mai 2012. Le contrat de travail a été transféré à cette dernière.
Le salarié a saisi la juridiction prud’homale à l’effet d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail et le paiement de diverses sommes.
En cassation, l’employeur a fait grief à l’arrêt de la cour d’appel de constater la nullité de la convention de forfait jours prévue au contrat de travail et de le condamner à payer au salarié certaines sommes au titre des heures supplémentaires, des repos compensateurs, des congés payés afférents, et à titre de dommages-intérêts pour non-respect par l’employeur des durées quotidienne et hebdomadaire de travail. Selon lui : l’avenant n° 22 à la convention collective des hôtels, cafés et restaurant en date du 16 décembre 2014 ayant fait l’objet d’un arrêté d’extension du 29 février 2016, a défini les nouvelles conditions de la convention individuelle de forfait jours sur l’année pour un salarié cadre autonome ; […] la cour d’appel a retenu qu’elles étaient applicables à compter du 1er avril 2016, que la société ne pouvait s’en prévaloir du fait que la convention de forfait jours du salarié « avait été précédemment annulée » et qu’il appartenait donc à l’employeur de soumettre au salarié une nouvelle convention de forfait conforme aux nouveaux accords ; l’avenant n° 22 du 16 décembre 2014 […] prévoit que ses dispositions « se substituent aux dispositions de l’article 13.2 de l’avenant n° 1 du 13 juillet 2004 », de sorte que cet avenant s’est, dès le 1er avril 2016, appliqué immédiatement à la convention individuelle de forfait stipulée dans le contrat de travail de l’intéressé sous l’égide de la convention collective nationale des hôtels-cafés- restaurants, la cour d’appel ne pouvait donc constater la nullité de la convention de forfait au moment où elle a statué […].
Décision
Pour la Cour de cassation, après avoir fait ressortir que les dispositions de l’article 13.2 de l’avenant n° 1 du 13 juillet 2004 relatif à la durée et à l’aménagement du temps de travail, aux congés payés, au travail de nuit et à la prévoyance à la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants du 30 avril 1997 n’étaient pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail d’un salarié ayant conclu une convention de forfait jours restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, de son travail, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé de l’intéressé, la cour d’appel a retenu à bon droit qu’à défaut d’avoir soumis au salarié une nouvelle convention de forfait jours après le 1er avril 2016, date de l’entrée en vigueur de l’arrêté d’extension de l’avenant n° 22 du 16 décembre 2014 relatif aux cadres autonomes, l’employeur ne pouvait se prévaloir des dispositions de ce texte pour la période postérieure au 1er avril 2016 ; qu’elle en a exactement déduit que la convention de forfait jours était nulle.
Par conséquent, l’argument de l’employeur est rejeté (Soc. 16 octobre 2019). L’employeur fait grief à l’arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail et de le condamner au paiement de diverses sommes indemnitaires au titre de la rupture ; selon lui :
– pour faire droit à la demande de résiliation judiciaire du salarié aux torts de la société, la cour d’appel a déclaré que l’atteinte aux droits du salarié en ce qui concerne l’organisation de son temps travail, son temps de repos et les conséquences inévitables que cette situation faisait peser sur sa vie personnelle constituait un motif suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail ; ces griefs ont été invoqués par le salarié au soutien de sa demande en paiement d’heures supplémentaires, demande que la cour d’appel a déclarée recevable en raison de la nullité de la convention de forfait stipulée dans le contrat de travail du salarié ; dès lors […] la cour d’appel ne pouvait constater l’annulation de la convention de forfait, ce qui excluait la recevabilité de la demande du salarié au titre des heures supplémentaires prétendument non rémunérées […] ;
– en déclarant, pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié, que l’atteinte aux droits du salarié en ce qui concerne l’organisation de son temps travail, son temps de repos et les conséquences inévitables que cette situation faisait peser sur sa vie personnelle constituait un motif suffisamment grave pour justifier de la résiliation judiciaire du contrat de travail, sans rechercher si cette atteinte était suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail […] la cour d’appel a privé sa décision de base légale.
Pour la Cour de cassation, la cour d’appel, qui a relevé une atteinte aux droits du salarié en ce qui concernait l’organisation de son temps travail, son temps de repos et les conséquences inévitables que cette situation faisait peser sur sa vie personnelle a, faisant ressortir que cette atteinte rendait impossible la poursuite du contrat de travail, pu retenir qu’elle constituait un motif suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail. Par conséquent, l’argument de l’employeur est rejeté.
Bibliographie
Michel Miné, Droit du travail en pratique, 2019-2020 (30e édition),
Éditions Eyrolles (collection Le grand livre), 860 p., 39 euros.