Pour en savoir plus
L’accident de trajet est assimilé à l’accident de service.
Une circulaire du 13 mars 2006 (1), commentant les dispositions de l’article L.411-2 du Code de la Sécurité sociale applicables au régime général, a défini l’accident de trajet comme « l’accident survenu pendant le trajet d’aller et de retour, entre sa résidence principale, une résidence secondaire présentant un caractère de stabilité ou tout autre lieu où le fonctionnaire territorial se rend de façon habituelle pour des motifs d’ordre familial et le lieu du travail. Ce trajet peut ne pas être le plus direct lorsque le détour effectué est rendu nécessaire dans le cadre d’un covoiturage régulier ; entre son lieu de travail et le restaurant, la cantine ou, d’une manière plus générale, le lieu où le salarié prend habituellement ses repas, et dans la mesure où le parcours n’a pas été interrompu ou détourné pour un motif dicté par l’intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante ou indépendant de l’emploi ».
Au fil des affaires soumises à lui, le juge administratif a été amené à confirmer ces principes généraux et à apporter certaines précisions. En premier lieu, constitue un accident de trajet l’accident dont est victime un agent, qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s’accomplit le travail et sa résidence et pendant la durée normale pour l’effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l’accident du service (2).
Ainsi a été reconnu imputable au service l’accident survenu alors que l’agent avait quitté son service quarante-cinq minutes avant le terme normal de son travail, sans autorisation mais après avoir transmis ses consignes à la relève et sans intention de ne pas rejoindre son domicile dans un délai normal, et par son itinéraire habituel.
Couverture de l’agent lors du trajet domicile travail
En outre, entre le domicile et le travail, l’agent est protégé dès qu’il franchit le seuil de sa propriété ou, pour le retour, jusqu’à ce qu’il franchisse ce seuil.
Ainsi, ne constituent pas un accident de trajet : • l’accident survenu à l’agent qui, alors qu’il revient du travail, fait une chute en sortant de son véhicule, dès lors que la voiture était rentrée dans l’enceinte de sa propriété (3) ; • ou encore l’accident survenu à l’agent qui, après être rentré chez lui en voiture, ressort de sa propriété pour tenter de rattraper son véhicule dont le frein n’était pas serré et se blesse à cette occasion (4).
A cet égard, il faut retenir non pas l’endroit où l’agent est tombé, mais l’endroit où s’est situé le point de déséquilibre à l’origine de la chute : ainsi, l’agent qui, en rentrant de son travail, glisse sur des dalles humides alors qu’il franchit la porte donnant accès à son jardin privatif est victime d’un accident de service dès lors que le point de déséquilibre se situe à l’extérieur de la cour privative (5).
Les cas de trajets indirects
Si, sur le principe, le trajet emprunté doit être le plus direct, le fait que l’agent effectue un détour peut ne pas remettre en cause l’imputabilité au service de l’accident :
• dans la mesure où ce détour est fondé sur un motif lié aux besoins du service ou aux exigences de la circulation (6) ;
• dans la mesure où ce détour est fondé sur un motif lié aux nécessités de la vie courante. Ainsi, le détour est légitime pour se rendre à la boulangerie à la sortie du travail (7), pour déposer son enfant à l’école (8), pour le déposer chez la nourrice (9), pour aller retirer un chéquier à son bureau de poste (10). En revanche, ne sont pas justifiés le détour pour aller prendre un café entre le lieu de prise des repas et le lieu de travail (11), ni le détour effectué par l’agent à la sortie de son travail, dans la direction opposée à celle du domicile, pour aller chercher sa femme et rentrer avec elle (12) ;
• et dans la mesure où l’écart par rapport au trajet habituel est involontaire (13).
Accident survenu à l’occasion d’un arrêt sur le trajet : celui-ci doit être justifié par un besoin de la vie courante
D’après la jurisprudence, constituent un arrêt justifié, permettant la reconnaissance de l’imputabilité : l’interruption du trajet pour acheter des produits alimentaires (14), pour faire des examens dans un laboratoire d’analyses médicales (15), pour acheter des journaux (16), pour amener son enfant chez la nourrice (17), ainsi que l’état de santé de l’agent (18).
En revanche, ne peuvent être considérés comme étant liés aux besoins de la vie courante l’arrêt d’un agent descendu de son véhicule à l’occasion d’un accident de la circulation pour se rendre à la rencontre d’une personne manifestement agressive, et qui est finalement lui-même victime d’une blessure (19), pas plus que l’interruption du trajet pour aider un agent de La Poste à soulever son véhicule qui était en mauvaise position au bord de la route (20).
Cependant, même si l’arrêt ou le détour est justifié par les nécessités de la vie courante, le fait que l’accident se produise à l’intérieur d’un bâtiment fait qu’il ne peut pas être reconnu imputable au service. C’est ainsi que le Conseil d’Etat a jugé que n’ont pas été reconnus imputables au service :
• un accident survenu à un agent à l’intérieur du bâtiment d’une crèche, alors qu’elle avait interrompu son trajet pour déposer sa fille (21) ;
• un accident survenu à un agent à l’intérieur d’un magasin d’alimentation où elle s’était arrêtée pour acheter son déjeuner alors qu’elle se rendait à son travail (22).
Le moment de l’accident ne doit pas être en décalage avec les horaires normaux de service
Ont ainsi été reconnus imputables au service des accidents de trajet survenus alors que l’agent avait un léger retard sur l’horaire de début de service (23), alors qu’il avait quitté son domicile avec une avance sensible (24), ou alors qu’il avait été autorisé par son supérieur hiérarchique à se rendre à son domicile pendant ses heures de service (25).
De manière générale, le fait que l’agent soit parti en avance par rapport à ses horaires de travail ne rompt pas, par lui-même, le lien avec le service. En cas d’écart sensible avec ses horaires, et sauf dans le cas où ce départ a été autorisé, il appar- tient à l’employeur de rechercher, au vu des raisons et circonstances du départ, si l’accident présente un lien direct avec le service.
En revanche, n’a pas été reconnu imputable au service un accident survenu pendant une pause alors que le fonctionnaire se rendait à un laboratoire d’analyses pour effectuer un examen médical, sur autorisation de son supérieur, dès lors que l’examen était sans lien avec le service (26). Dans le même sens, n’ont pas été reconnus imputables au service un accident survenu plus de quatre heures après la fermeture du service, sans indication apportée au juge sur l’emploi du temps de l’agent (27), ou encore un accident survenu pendant le trajet entre le domicile et le lieu de travail à une heure où l’agent aurait dû être en service, dès lors que son départ anticipé n’avait pas été autorisé (28).
L’accident survenu entre le travail et le lieu de restauration n’est pas un accident de service si l’agent ne prend pas habituellement ses repas dans ce lieu (29), sauf cas de force majeure ou nécessité liée à l’exercice des fonctions.
Enfin, la protection liée à l’accident de trajet ne s’arrête pas lorsque l’agent est en congé pour raison de santé : a ainsi été reconnu imputable au service l’accident de la circulation survenu à l’agent alors que, bénéficiant d’un congé de longue durée, il revenait à son domicile, par un trajet normal, d’une visite médicale de contrôle à laquelle il avait été convoqué à la demande de son administration (30).
(1) Circulaire du 13 mars 2006 du ministère délégué aux Collectivités territoriales relative à la protection sociale des fonctionnaires territoriaux nommés dans des emplois permanents à temps complet ou à temps non complet contre les risques maladie et accidents de service.
(2) CE, 17 janvier 2014, requête n° 352710.
(3) CE, 6 mars 1985, requête n° 47209.
(4) Caa Bordeaux, 23 février 2006, requête n° 02BX01351.
(5) Caa Nancy, 1er février 2001, requête n° 96NC01814.
(6) CE, 4 décembre 1974, requête n° 94336.
(7) CE, 2 février 1996, requête n° 145516.
(8) Caa Douai, 25 janvier 2005, requête n° 02DA00247.
(9) Caa Nancy, 24 octobre 1996, requête n° 94NC00486.
(10) Caa Bordeaux, 15 mars 2004, requête n° 00BX02696.
(11) Caa Paris, 7 juillet 2005, requête n° 01PA03508.
(12) CE, 12 février 1982, requête n° 20020.
(13) CE, 29 janvier 2010, requête n° 314148.
(14) CE, 21 juin 1995, requête n° 144515.
(15) CE, 15 mars 1995, requête n° 118379.
(16) CE, 5 octobre 1983, requête n° 38142.
(17) CE, 9 janvier 1995, requête n° 124026.
(18) CE, 13 décembre 1985, requête n° 43609.
(19) Caa Marseille, 24 octobre 2006, requête n° 03MA01008.
(20) Caa Bordeaux, 20 décembre 2004, requête n° 01BX00448.
(21) CE, 10 février 2006, requête n° 264293.
(22) CE, 4 avril 2012, requête n° 341190.
(23) CE, 4 janvier 1985, requête n° 57465.
(24) CE, 17 juin 1977, requête n° 04100.
(25) CE, 15 novembre 1995, requête n° 128812.
(26) CE, 26 mars 2010, requête n° 324554.
(27) CE, 15 mai 1985, requête n° 54396.
(28) TA Paris, 18 octobre 2001, requête n° 9822132/5.
(29) CE, 13 juin 1997, requête n° 132340.
(30) CE, 10 mai 1995, requête n° 100903.