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Désormais, un même candidat ne peut plus s’inscrire simultanément à plusieurs concours, organisés le même jour. Un site unique permettra de le vérifier.
Edoardo MARQUÈS
L’article 89 de la loi dite de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 1 est venu modifier l’article 36 de la loi du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale 2, pour faire en sorte qu’un même candidat ne puisse s’inscrire qu’une fois aux mêmes concours organisés le même jour par divers centres départements ou interdépartementaux (Cdg et Cig) de gestion de la fonction publique territoriale de France.
Ainsi, lorsque plusieurs centres de gestion organisent un concours permettant l’accès à un emploi d’un même grade dont les épreuves ont lieu simultanément, les candidats ne peuvent pas figurer sur plusieurs listes des admis à participer, quelles que soient les modalités d’accès au concours. Pour être effective, cette disposition va nécessiter la publication des listes d’admission à concourir sur un site unique permettant une telle vérification. À noter que le Journal officiel du 7 septembre 2019 a apporté un rectificatif à cette mesure. Ainsi, le nouvel article 36 de la loi du 26 janvier 1984, tel qu’il est réécrit par la loi du 6 août 2019, dite de « transformation de la fonction publique » précise : « Lorsque plusieurs centres de gestion organisent un concours permet- tant l’accès à un emploi d’un même grade dont les épreuves ont lieu simultanément, les candidats ne peuvent pas figurer sur plusieurs listes des admis à participer, quelles que soient les modalités d’accès au concours prévues aux 1° à 3° [au lieu de « aux 1° et 2° », antérieurement à la parution du rectificatif ] du présent article. Les modalités d’application du présent alinéa sont précisées par décret.»
Les concours concernés sont donc les concours externe, interne et de 3e voie et non seulement les concours externe et interne d’accès à un grade, comme indiqué dans la première version de la loi. Pour sa mise en œuvre, le décret n° 2021- 376 du 31 mars 2021 3 a été publié au Journal officiel du 2 avril 2021.
Ce que prévoit le décret du 31 mars 2021
Ce texte prévoit que le dispositif géré et mis en place par le groupement d’intérêt public informatique des centres de gestion comprendra deux étapes ayant pour finalité commune l’identification du candidat inscrit à plusieurs concours, organisés simultanément par plusieurs centres de gestion, permettant l’accès à un même grade de l’un des cadres d’emplois de la fonction publique territoriale quelles que soient les modalités d’accès aux concours prévues aux 1° à 3° de l’article 36 de la loi du 26 janvier 1984 précitée et de limiter son inscription à un seul concours.
La première étape consistera à collecter les données personnelles d’un candidat au moyen d’une application nationale unique accessible sur le site internet du centre de gestion organisateur du concours. La seconde étape, permettra le traitement des données au sein d’une base de données dénommée « concours – Fpt ».
Le décret détermine également les données à caractère personnel des candidats collectées et traitées par le groupement d’intérêt public afin de permettre l’identification du candidat inscrit plusieurs fois à un concours organisé par plusieurs centres de gestion dont les épreuves ont lieu simultanément pour l’accès à un emploi du même grade de l’un des cadres d’emplois de la fonction publique territoriale.
Ces dispositions sont applicables aux concours dont l’arrêté d’ouverture est publié à compter du 1er janvier 2021. Cette disposition appelle plusieurs remarques.
Les concours externes, internes et de 3e voie constituent des concours distincts
En premier lieu, l’expression « concours permettant l’accès à un emploi d’un même grade dont les épreuves ont lieu simultanément », suppose qu’il s’agit d’un même type de concours. En effet, juridiquement, des concours externe, interne et 3e voie d’accès à un même grade sont des concours distincts, même si, par commodité, les jurys sont souvent les mêmes. Il demeure donc possible de s’inscrire à deux, voire trois à concours, dans différents centres de gestion organisateurs ou même dans un seul centre, dès lors, bien sûr, que le candidat remplit les conditions exigées pour chacun de ces concours. C’est d’autant plus vrai lorsqu’un cadre d’emplois présente deux voies d’accès par concours, par exemple : technicien et technicien principal de 2e classe, il n’est pas interdit de s’inscrire aux deux voies d’accès, y compris lorsque les épreuves se déroulent le même jour.
En outre, la notion d’« accès à l’emploi d’un même grade » laisse entretenir un doute. En effet, en droit de la fonction publique territoriale, les concours sont destinés à vérifier les capacités des candidats à occuper un grade et donc à sélectionner les meilleurs. Le choix, parmi les lauréats, pour pourvoir des emplois, s’effectue au niveau de la collectivité ou de l’établissement qui recrute et non au niveau du concours. Cette formulation pourrait donc signifier, que la notion de « spécialité » prévue pour l’organisation de certains concours entre également en ligne de compte.
Ainsi, s’agissant, par exemple, de l’accès au grade d’attaché par concours, le statut particulier prévoit que chaque concours (externe, interne, 3e voie) s’organise sur la base de cinq spécialités :
a) administration générale ;
b) gestion du secteur sanitaire et social ;
c) analyste ;
d) animation ;
e) urbanisme et développement des territoires.
Cette disposition prendrait donc en compte la notion d’accès à des emplois différents, au sens de l’article 36 précité. Dans cette hypothèse, les candidats auraient aussi la possibilité de s’inscrire à des concours, dans des spécialités différentes, organisés le même jour.
Par ailleurs, la notion de simultanéité des épreuves concerne en réalité, la date de la 1re épreuve écrite d’admissibilité. Celle-ci doit nettement figurer dans l’arrêté d’ouverture des concours permettant l’inscription des candidats. Si tel ou tel centre venait à la modifier, il ne pourrait plus opposer la règle d’une seule inscription à un candidat.
Enfin une autre difficulté d’application est à soulever s’agissant des concours dénués d’épreuves écrites d’admissibilité. En effet, l’article 36 de la loi du 26 janvier 1984 prévoit que « les concours mentionnés aux 1°, 2° et 3° (externe, interne, 3e concours) […] peuvent être organisés sur épreuves, ou consister en une sélection opérée par le jury au vu soit des titres, soit des titres et travaux des candidats. Cette sélection est complétée par un entretien oral avec le jury et, le cas échéant, par des épreuves complémentaires. » Antérieurement, à la publication de la loi du 6 août 2019, précitée, cette disposition était réservée aux concours d’accès aux grades des filières sociale, médico-sociale et médico-technique (redevenue une seule filière depuis l’entrée en application de la loi du 6 août 2019, précitée). La loi précitée a ouvert cette possibilité à l’ensemble des filières. La notion de simultanéité des épreuves pourra se poser puisque tous les candidats ne peuvent, en pratique, être convoqués le même jour pour participer à des oraux.
Obligation de publicité des « listes des admis à concourir »
En deuxième lieu, la notion de « liste des admis » se posera également. Pour qu’elles puissent être opposables aux candidats, il faudra que celles-ci soient publiées par les centres organisateurs (ce qui, actuellement est très rarement le cas), c’est ce qui permettra à un candidat exclut, qui s’estime lésé de contester les opérations d’organisation d’un concours devant le juge administratif en vue d’en obtenir son annulation.
Vers la limitation du nombre d’inscriptions dans le temps à un concours d’un même candidat ?
Enfin, on peut craindre, à l’avenir, qu’avec un tel dispositif, s’il s’avère efficace, car centralisé, les candidats soient astreints à un nombre d’inscriptions aux concours limité dans le temps. Cette mesure, fondée sur des considérations d’ordre économique, avait déjà été instituée pour nombre de concours d’accès aux grades de la fonction publique territoriale (notamment à celui d’attaché territorial), lors de la parution des statuts particuliers, mais elle a été abandonnée du fait de l’incapacité des organisateurs à pouvoir vérifier la bonne application de la règle. Seule la tenue d’un fichier unique le permet et c’est ce que prévoit la loi du 6 août 2019 et son décret du 30 mars 2021, précités.
À noter que cette règle s’applique s’agissant de certains concours organisés par le Centre national de la fonction publique territoriale (Cnfpt). Par exemple l’article 4 du décret n° 87-1097 du 30 décembre 1987, portant statut particulier du cadre d’emplois des administrateurs territoriaux, prévoit que « nul ne peut concourir plus de trois fois à l’un des concours d’accès ni plus de cinq fois à l’ensemble des concours » [d’accès au grade d’administrateur].
Cependant cette volonté semble contrariée par la parution du décret n° 2021-334 du 26 mars 2021 4. Celui-ci supprime, en effet, les dispositions limitant le nombre de présentations possible à un concours, à un examen professionnel, ou à un cycle préparatoire à un concours.
Cette suppression concerne, pour la fonction publique de l’État : les concours d’accès à l’École nationale d’administration (Ena) et à ses cycles préparatoires, ainsi que les concours d’accès aux corps de l’inspection générale des affaires sociales pour les titulaires du doctorat, de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche pour les titulaires du doctorat, des professeurs des universités de médecine générale et maîtres de conférences de médecine générale, des ingénieurs des mines, des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts, des administrateurs de l’Insee, des conseillers des affaires étrangères, des commissaires de police, des magistrats de tribunal administratif ou de cour administrative d’appel, des conseillers de chambre régionale des comptes, des directeurs des services pénitentiaires, des inspecteurs de santé publique vétérinaire, des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne, des ingénieurs des travaux de la météorologie, des attachés statisticiens de l’Insee, des contrôleurs des finances publiques, des inspecteurs des finances publiques. Pour ce dernier corps et celui des inspecteurs des douanes et droits indirects, le décret supprime la limite fixée pour l’avancement de grade par examen professionnel.
Pour la fonction publique territoriale, elle concerne l’accès au cadre d’emplois des administrateurs territoriaux ainsi qu’à celui des conservateurs territoriaux du patrimoine.
Pour la fonction publique hospitalière, elle concerne l’accès aux corps des directeurs d’hôpital, des directeurs d’établissement sanitaire, social et médico-social, des directeurs des soins et des attachés d’administration hospitalière, ainsi qu’aux cycles préparatoires aux concours d’accès à ces corps.
Pour la magistrature de l’ordre judiciaire, elle concerne les concours d’accès à l’École nationale de la magistrature (Enm) et au cycle préparatoire au deuxième concours, ainsi que les concours complémentaires de recrutement des magistrats judiciaires des premier et second grades. Ces dispositions sont entrées en vigueur le lendemain de leur publication au Journal officiel, soit le 29 mars 2021.
1. Loi n° 2019-828 du 6 août 2019.
2. Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, titre III du statut de la fonction publique.
3. Décret n° 2021-376 du 31 mars 2021 pris en application de l’article 36 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale en vue de limiter l’inscription d’un candidat à
un concours permettant l’accès à un emploi du même grade organisé simultanément par plusieurs centres de gestion.
4. Décret n° 2021-334 du 26 mars 2021 portant suppression des limites au nombre de présentations aux concours et examens de la fonction publique civile et de la magistrature, publié au Journal officiel du 28 mars 2021.