Fonction publique Quand un vacataire devient agent en Cdi

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Fonction publique  Quand un vacataire devient agent en Cdi
Le poste était pérenne, mais pas le statut de la salariée… Au terme de onze ans de travail précaire, cette conférencière dieppoise a obtenu de bénéficier d’un Cdi de droit public. Edoardo MARQUÈS

Vacataire pendant onze ans, une guide conférencière a obtenu de son employeur le bénéfice d’un contrat de droit public à durée indéterminée. Ainsi en a décidé la cour administrative d’appel de Douai 1, eu égard à la permanence de son activité et de l’emploi occupé.

En l’espèce, Mme G., auparavant salariée de l’association Dieppe ville d’art et d’histoire, qui l’employait en qualité de guide conférencière, avait été recrutée, à compter du 1er janvier 2003 et pour exercer les mêmes fonctions, par la commune de Dieppe, qui avait souhaité reprendre au sein de ses effectifs les guides conférenciers contribuant à la valorisation et au rayonnement de son patrimoine. Pour ce faire, un arrêté du maire daté du 4 avril 2003 précisait que le recrutement de Mme G. était opéré « en qualité d’agent non titulaire vacataire pour effectuer des missions ponctuelles de guide conférencier » et prévoyait que l’intéressée percevrait une rémunération fixée sur la base d’un tarif forfaitaire à la vacation.

Étant demeurée au service de ladite commune durant onze années, au cours des- quelles elle a assuré, selon des volumes horaires variables, les visites et actions de communication qui lui ont été confiées, Mme G. a souhaité bénéficier d’une situation plus pérenne. Estimant que son recrutement répondait, en réalité, à un besoin permanent de la commune en matière de valorisation de son patrimoine, elle a demandé au maire, par une lettre du 22 décembre 2014, de requalifier son engagement en contrat d’agent non titulaire, au sens du décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale et de tirer toutes les conséquences juridiques de la requalification demandée, tant en ce qui concerne la rémunération que les cotisations sociales. Par un courrier daté du 23 février 2015, le maire a refusé de faire droit à cette demande, en estimant que l’état de vacataire qui était celui de Mme G. depuis son recrutement par l’arrêté du 4 avril 2013, était devenu définitif.

Face à ce refus, l’intéressée saisit le tribunal administratif de Rouen pour demander l’annulation de la décision du maire. Ce dernier fait droit à la demande de Mme G. et fait injonction à la Ville de régulariser, dans un délai de trois mois, la situation de l’intéressée en lui reconnaissant, à compter du 1er janvier 2003, le statut d’agent non titulaire de la fonction publique territoriale au sens du décret du 15 février 1988 précité, avec toutes conséquences de droit, notamment en matière de cotisations sociales. La commune fait alors appel du jugement devant la cour administrative de Douai.

Le juge administratif reconnaît les droits de la plaignante


La cour constate que Mme G. a été recrutée afin de contribuer, en tant que guide conférencière, à la mise en valeur du patrimoine culturel de la ville de Dieppe, adhérente au réseau des villes d’art et d’histoire. Elle remarque également que l’arrêté de recrutement de Mme G. ne fixe aucun terme à ses missions, ni ne comporte une quelconque programmation de celles-ci. En outre et au-delà de la qualification de vacataire que le maire a entendu donner à ce recrute- ment, la juridiction note qu’il « ressort des pièces du dossier qu’ont été, dans ce cadre, confiées à Mme G. le soin d’assurer, en réa- lité sur une longue période, qui n’a pris fin qu’au 1er janvier 2015, des visites guidées de différents monuments, de donner des conférences, d’animer des ateliers du patrimoine, ainsi que des formations, et d’assurer des publications ». Par ailleurs, indique la Cour, Mme G. était astreinte à participer à plusieurs réunions mensuelles au sein de la mairie afin d’organiser son travail. Enfin, la juridiction constate que le temps de travail annuel de l’intéressée était compris entre 294 et 707 heures. Dans ces conditions, souligne la cour « Mme G. doit être regardée comme ayant été recrutée non pour effectuer des vacations ponctuelles de guide conférencière, mais pour répondre à un besoin permanent de la commune, s’inscrivant dans le cadre de la mise en œuvre de sa politique de valorisation de son patrimoine culturel, alors même que les horaires hebdomadaires de l’intéressée étaient irréguliers et que sa rémunération était déterminée à la vacation. Par suite […] eu égard à la durée et aux conditions dans lesquelles elle a été employée durant douze années par la commune […], [celle-ci] aurait dû, en l’absence de cadre d’emplois de la fonction publique territoriale susceptible alors de répondre à un tel besoin, bénéficier, dès son recrutement au 1er janvier 2003, d’un contrat d’engagement à durée indéterminée en application de l’article 3, dans sa rédaction alors en vigueur, de la loi du 26 janvier 1984 […] » 2.

Néanmoins, la cour précise que Mme G. doit être rémunérée sur la base d’un grade de la filière culturelle, tout en excluant celui de conservateur du patrimoine, qui servait pourtant de référence au taux de vacation fondant sa paie, à charge pour la ville de le déterminer « et de la faire bénéficier, à tout le moins, des durées d’avancement maximales prévues pour chacun des échelons du grade considéré, en ajustant cet avancement en fonction de la manière de servir de l’intéressée, telle qu’elle ressort de ses fiches de notation et d’évaluation ». En outre, conformément à la jurisprudence du Conseil d’État 3, l’intéressée, précise la cour, doit bénéficier, depuis le 1er janvier 2003 du régime indemnitaire « par référence au grade retenu pour la reconstitution de sa carrière, afin de tenir compte de son investissement et du niveau de responsabilité et de technicité inhérents aux missions qui lui ont été confiées ».

1. Caa Douai, 5 juillet 2018, requêtes n° 17DA00514 et 18DA00186 ;
2. Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
3. Ce, 30 mars 2016, commune de Saint-Denis, requête n° 380616.

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