Fonction publique : Contrôle du temps de présence par un système électronique

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Fonction publique : Contrôle du temps de présence par un système électronique
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Les agents doivent être informés individuellement avant sa mise en œuvre
La décision d’instaurer un système de contrôle biométrique du temps de présence dans une administration n’est pas opposable aux fonctionnaires et aux non-titulaires dès lors, notamment, que la formalité de l’information individuelle des agents, prescrite par la loi du 6 janvier 1978, n’a pas été respectée. Il en résulte que l’employeur public ne peut se fonder sur le refus de se soumettre à ce contrôle pour sanctionner un agent. C’est ce que vient de rappeler le juge administratif dans une récente affaire (1).
Edoardo MARQUÈS

En l’espèce, la commune de Garges-lès-Gonesse avait décidé d’installer un système biométrique de contrôle du temps de présence de ses agents comportant une badgeuse permettant une reconnaissance du contour de deux doigts d’une main. Le 21 décembre 2010 puis le 20 janvier 2011, le maire de la commune de Garges-lès-Gonesse avait pris à l’encontre de M. C… deux sanctions disciplinaires, un avertissement puis une exclusion temporaire de fonctions d’une durée de deux jours sanctionnant le refus de l’agent de se soumettre à ce contrôle biométrique de son temps de présence. L’agent en cause avait alors introduit deux recours gracieux tendant au retrait de ces décisions. En ne répondant pas à ces recours, la commune de Garges-lès-Gonesse avait implicitement rejeté ces demandes. M. C… avait alors saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise de deux demandes tendant à l’annulation de chacune de ces deux décisions de sanction disciplinaire. Par jugement commun en date du 18 février 2013 dont M. C… relève appel, le tribunal administratif avait rejeté ses demandes.

Pour la cour administrative d’appel de Versailles, saisie en appel, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’information individuelle exigée par les dispositions des articles 2 et 32 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, ait été délivrée individuellement aux agents de la commune par la commune de Garges-lès-Gonesse. La cour constate en effet que, par deux courriers en date des 21 mars et 31 août 2011, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) avait rappelé la commune à ses obligations sur ce point. Et ce même si, par un autre courrier daté du 27 février 2012, la Cnil avait informé les agents de la commune que celle-ci s’était engagée à délivrer cette information : ce courrier est postérieur aux décisions attaquées. En outre, constate la cour, des attestations sur l’honneur établies postérieurement à ce courrier par certains agents de la commune indiquaient que cet engagement n’a pas été suivi d’effet.

Sans information individuelle de chaque agent, la procédure de contrôle de présence leur est inopposable

Pour le juge, si la méconnaissance d’une telle obligation à la charge de la commune est sans incidence sur la légalité de la décision du maire d’instaurer le contrôle biométrique des temps de présence, dans la mesure où une telle formalité doit être accomplie avant la mise en œuvre de l’arrêté décidant l’organisation de ce système de contrôle, et non nécessairement avant son édiction, sa méconnaissance doit en revanche être regardée comme ayant eu pour effet de rendre une telle décision inopposable aux agents de la commune. Ainsi, la cour administrative d’appel de Versailles annule le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 18 février 2013, les sanctions disciplinaires attaquées en date des 21 décembre 2010 et 21 janvier 2011 ainsi que les décisions implicites par lesquelles le maire de la commune de Garges-lès-Gonesse a refusé de retirer ces décisions. En effet, aux termes des dispositions de l’article 2 de la loi susvisée du 6 janvier 1978 : « La présente loi s’applique aux traitements automatisés de données à caractère personnel, ainsi qu’aux traitements non automatisés des données à caractère personnel contenues ou appelées à figurer dans des fichiers, à l’exception des traitements mis en œuvre pour l’exercice d’activités exclusivement personnelles, lorsque leur responsable remplit les conditions prévues à l’article 5. […] La personne concernée par un traitement de données à caractère personnel est celle à laquelle se rapportent les données qui font l’objet du traitement. »

En outre, en vertu des dispositions de l’article 32 de la même loi : « La personne auprès de laquelle sont recueillies des données à caractère personnel la concernant est informée, sauf si elle l’a été au préalable, par le responsable du traitement ou son représentant :

» 1°) de l’identité du responsable du traitement et, le cas échéant, de celle de son représentant ;

»2°) de la finalité poursuivie par le traitement auquel les données sont destinées ;

»3°) du caractère obligatoire ou facultatif des réponses ;

» 4°) des conséquences éventuelles, à son égard, d’un défaut de réponse ;

» 5°) des destinataires ou catégories de destinataires des données ;

» 6°) des droits qu’elle tient des dispositions de la section 2 du présent chapitre…

» C’est cet ensemble de prescriptions qui est nécessaire préalablement à la mise en œuvre d’un système de contrôle du temps de présence, dans l’administration (comme dans le privé, d’ailleurs) ; sans oublier, avant cela même, de consulter les organisations syndicales, de recueillir l’avis du comité technique et celui du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (Chsct).

(1) Cour administrative d’appel de Versailles, 19 juin 2014, M. C…, requête n° 13VE01187.

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