Discriminations – Un droit à mobiliser ! (suite)

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Discriminations - Un droit à mobiliser ! (suite)
Le droit du travail recule dans sa fonction de défense des salariés ; cependant, dans le même temps, celui des discriminations dans l’emploi et le travail progresse. Ce paradoxe se retrouve notamment dans la « loi relative au travail » qui écarte comme jamais le principe de faveur mais contient, à la suite d’interventions d’acteurs sociaux qui ont fait adopter des amendements, quelques dispositions favorables à la lutte contre les discriminations (ne remettant pas en cause le caractère globalement négatif de cette loi). Michel CHAPUIS

Projet de loi « relatif au travail,
 à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels » adopté le 21 juillet 2016 (loi promulguée le 8 août)

 

Discriminations sexuelles, harcèlement sexuel et agissements sexistes

• Un nouvel aménagement de la charge de la preuve des harcèlements plus favorable aux demandeurs et demandeuses : lorsque survient un litige (en matière de harcèlement sexuel, moral…), le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise, ou le salarié « présente des éléments de fait laissant supposer » l’existence d’un harcèlement (art. L. 1154-1 du code du travail).
• Le règlement intérieur rappelle les dispositions relatives aux harcèlements moral et sexuel « et aux agissements sexistes » prévues par le présent code (art. L. 1321-2).
• L’employeur met en œuvre les mesures prévues pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs sur le fondement des principes généraux de prévention, notamment : planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel « ainsi que ceux liés aux agissements sexistes » (art. L. 4121-2). • Le Chsct contribue à la promotion de la prévention des risques professionnels dans l’établissement et suscite toute initiative qu’il estime utile dans cette perspective. Il peut proposer notamment des actions de prévention du harcèlement moral, « du harcèlement sexuel et des agissements sexistes » (art. L. 4612-3).

 

Egalité professionnelle

• Les accords d’entreprise ne pourront pas déroger aux accords de branche plus favorables en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
• En vue de la consultation annuelle sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi, l’employeur met à disposition du comité d’entreprise des informations dans la base de données économiques et sociales (Bdes). Les informations contenues dans la Bdes concernant l’« égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise » sont précisées (art. L. 2323-8-1° bis) :
– diagnostic et analyse de la situation comparée des femmes et des hommes pour chacune des catégories professionnelles de l’entreprise en matière d’embauche, de formation, de promotion professionnelle, de qualification, de classification, de conditions de travail, de sécurité et de santé au travail, de rémunération effective et d’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale ;
– analyse des écarts de salaire et de déroulement de carrière en fonction de l’âge, de la qualification et de l’ancienneté ;
– évolution des taux de promotion respectifs des femmes et des hommes par métier dans l’entreprise ;

– part des femmes et des hommes dans le conseil d’administration.

Le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (Csepfh) obtient une reconnaissance par la loi. Ce conseil participe à la définition et à la mise en œuvre de la politique menée en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (avis sur les projets de textes notamment) (art. L. 1145-1).

 

Discriminations syndicales

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi, le gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’état des discriminations syndicales en France sur la base des travaux réalisés par le Défenseur des droits. Ce rapport fait état des bonnes pratiques observées dans les entreprises pour lutter contre ces discriminations (art. 30 de la loi).

Décret du 29 juin 2016 relatif aux modalités de consultation des institutions représentatives du personnel

Ce texte précise notamment les indicateurs sur la situation comparée des femmes et des hommes afférents aux nouveaux domaines introduits par la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.
La Bdes rassemble notamment les informations suivantes (art. R. 2323-1-3 – entreprises d’au moins 300 salariés ; art. R. 2323-1-4 – entreprises de moins de 300 salariés) :

1 Diagnostic et analyse de la situation respective des femmes et des hommes pour chacune des catégories professionnelles de l’entreprise dans les domaines suivants :
a) Embauche ;

b) Formation ;

c) Promotion professionnelle ;

d) Qualification ;

e) Classification ;

f ) Conditions de travail ;

g) Sécurité et santé au travail ;

h) Rémunération effective ;

i) Articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle.

2 Analyse des écarts de salaires et de déroulement de carrière en fonction de l’âge, de la qualification et de l’ancienneté.

3 Evolution des taux de promotion respectifs des femmes et des hommes par métiers dans l’entreprise.

 

Dans les entreprises d’au moins 300 salariés, l’employeur met à disposition du comité d’entreprise, dans la base de données économiques et sociales, les indicateurs permettant d’analyser la situation comparée des femmes et des hommes dans l’entreprise et son évolution (art. R. 2323-12). Ces indicateurs permettent également d’analyser les conditions dans lesquelles s’articulent l’activité professionnelle et l’exercice de la responsabilité familiale des salariés.

Ces indicateurs comprennent des données chiffrées permettant de mesurer les écarts. Ils contiennent également des données explicatives sur les évolutions constatées ou à prévoir. Figurent notamment dans la Bdes les informations suivantes :

• Rémunérations et déroulement de carrière :

a) Promotion :
Données chiffrées par sexe :
– nombre et taux de promotions par catégorie professionnelle ;

– durée moyenne entre deux promotions ;
b) Ancienneté :
Données chiffrées par sexe :

– ancienneté moyenne par catégorie professionnelle ;

– ancienneté moyenne dans la catégorie professionnelle ;

– ancienneté moyenne par niveau ou coefficient hiérarchique ;

– ancienneté moyenne dans le niveau ou le coefficient hiérarchique ;

c) Age :
Données chiffrées par sexe :

– âge moyen par catégorie professionnelle ;

– âge moyen par niveau ou coefficient hiérarchique ;

d) Rémunérations :

Données chiffrées par sexe :

– rémunération moyenne ou médiane mensuelle par catégorie professionnelle ;
– rémunération moyenne ou médiane mensuelle par niveau ou coefficient hiérarchique (cet indicateur n’a pas à être renseigné lorsque sa mention est de nature à porter atteinte à la confidentialité des données correspondantes, compte tenu notamment du nombre réduit d’individus dans un niveau ou coefficient hiérarchique) ;

– rémunération moyenne ou médiane mensuelle par tranche d’âge ;

– nombre de femmes dans les dix plus hautes rémunérations.


• Conditions de travail, santé et sécurité au travail :


Données générales par sexe :

– répartition par poste de travail selon :

* l’exposition à des risques professionnels ;

* la pénibilité, dont le caractère répétitif des tâches ;


Données chiffrées par sexe :

– accidents de travail, accidents de trajet et maladies professionnelles :

* nombre d’accidents de travail ayant entraîné un arrêt de travail ;

* nombre d’accidents de trajet ayant entraîné un arrêt de travail ;

* répartition des accidents par éléments matériels selon les modalités définies au 3.2 de l’article R. 2323-17 ;

* nombre et dénomination des maladies professionnelles déclarées à la Sécurité sociale au cours de l’année ;
* nombre de journées d’absence pour accidents de travail, accidents de trajet ou maladies professionnelles ;

– maladies :
* nombre d’arrêts de travail ;

* nombre de journées d’absence ;

– maladies ayant donné lieu à un examen de reprise du travail en application du 3° (e) de l’article R. 4624-22 :

* nombre d’arrêts de travail ;

* nombre de journées d’absence.

 

Dans les entreprises de moins de 300 salariés, l’employeur met à disposition du comité d’entreprise, dans la base de données économiques et sociales, les indicateurs permettant d’analyser la situation comparée des femmes et des hommes dans l’entreprise et son évolution (art. R. 2323-9-4°) :

• analyse des données chiffrées par catégorie professionnelle de la situation respective des femmes et des hommes en matière d’embauche, de formation, de promotion professionnelle, de qualification, de classification, de conditions de travail, de santé et de sécurité au travail, de rémunération effective et d’articulation entre l’activité professionnelle et l’exercice de la responsabilité familiale, analyse des écarts de salaires et de déroulement de carrière en fonction de leur âge, de leur qualification et de leur ancienneté ; description de l’évolution des taux de promotion respectifs des femmes et des hommes par métiers dans l’entreprise ;

• stratégie d’action ; à partir de l’analyse des données chiffrées (mentionnées au a. du 4°), la stratégie comprend les éléments suivants :
– Mesures prises au cours de l’année écoulée en vue d’assurer l’égalité professionnelle. Bilan des actions de l’année écoulée et, le cas échéant, de l’année précédente. Evaluation du niveau de réalisation des objectifs sur la base des indicateurs retenus. Explications sur les actions prévues non réalisées.
– Objectifs de progression pour l’année à venir et indicateurs associés. Définition qualitative et quantitative des mesures permettant de les atteindre conformément à l’article R. 2242-2. Evaluation de leur coût. Echéancier des mesures prévues.

Bibliographie
Michel Miné,
Droit des discriminations dans l’emploi et le travail, 2016 (juillet),
éditions Larcier, 852 pages.

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