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C ’est la jurisprudence qui a encadré les clauses de non-concurrence, ignorées par le Code du travail et longtemps négligées par la plupart des conventions collectives : elles doivent tenir compte des fonctions exercées, être indispensables à la protection d’intérêts légitimes de l’entreprise, limitées dans l’étendue géographique et dans le temps et donner lieu à une compensation financière substantielle.
Elle a aussi précisé, dès 2007, que la compensation devait être versée après la rupture du contrat de travail et ne pouvait prendre la forme d’un versement mensuel s’ajoutant au salaire : « attendu que la contrepartie financière de la clause de non-concurrence a pour objet d’indemniser le salarié qui, après rupture du contrat de travail, est tenu d’une obligation qui limite ses possibilités d’exercer un autre emploi ; que son montant ne peut dépendre uniquement de la durée d’ exécution du contrat ni son paiement intervenir avant la rupture ; qu’il en résulte que la cour d’appel a, à bon droit, annulé la clause litigieuse. » (Cass. soc. 7 mars 2007, pourvoi n° 05-45511).
Un arrêt plus récent (Cass. soc. 17 novembre 2010, pourvoi n° 09- 42389) vient de confirmer et de préciser cette analyse. Le contrat d’un chef d’exploitation de l’entreprise de restauration collective Avenance Entreprises prévoyait l’interdiction d’exercer auprès des mêmes clients pour le compte d’un autre employeur pendant une durée d’un an après rupture du contrat de travail, sujétion compensée par le versement d’une prime mensuelle. Statuant sur différents points en litige après le licenciement de ce salarié, la cour d’appel de Colmar avait reconnu la nullité d’une telle clause.
Mais, sans doute sensible au fait que le salarié avait travaillé pour une entreprise concurrente cinq mois après le licenciement, elle avait considéré que cela ne pouvait lui être reproché (la clause de non-concurrence étant entachée de nullité) mais « qu’en revanche, le montant versé à ce titre se trouve dénué de cause (…) que dès lors que la nullité de la clause est encourue, la société Avenance Entreprises est fondée à réclamer le remboursement de l’ indemnité versée. »
Mais la cour de cassation censure cet arrêt :
– d’une part le paiement pendant la période d’exécution du contrat de travail de la contre-partie financière prévue par une clause de non-concurrence nulle s’analyse en un complément de salaire et n’est donc pas dénué de cause ;
– d’autre part, le salarié qui respecte une clause de non-concurrence nulle subit nécessairement un dommage et a droit à une indemnisation, quelque soit la durée pendant laquelle il a accepté la limitation prévue par la clause nulle.
Par conséquent, «en statuant ainsi, alors que l’employeur ne pouvait obtenir la restitution des sommes versées au titre d’une clause nulle et qu’il résultait de ses constatations que le salarié avait respecté la clause pendant plusieurs mois après la rupture du contrat de tra- vail, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »