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Face à une situation inédite et dégradée, l’engagement professionnel et la responsabilité sociale des ingénieurs, cadres et techniciens a conduit ces salariés à s’investir spontanément dans tous les rouages des services publics notamment ceux des urgences (mais aussi les pompiers, la police, la RATP, les agents de la ville de Paris,…) de façon à assurer la réponse aux besoins. On peut légitimement se demander si en l’absence de cette conscience pour l’intérêt général, les services publics amputés de moyens humains et matériels importants, conséquences des politiques d’austérité, auraient été en capacité de répondre aussi efficacement aux besoins ?
La menace terroriste pèse maintenant lourdement sur le débat public et sur nos conditions de travail à tous. Salariés qualifiés en responsabilité, nous sommes confrontés à des questions nouvelles. Dans un climat de peur, il nous faut faire respecter les valeurs de la République.
Dans le cadre de nos responsabilités, nous allons probablement être confrontés aux questions suivantes :
- Procédures de sécurité des biens et des personnes
Ne serait-il pas préférable de saisir les Institutions Représentatives du Personnel pour toute nouvelle mesure permet de partager l’identification des risques et d’impliquer l’ensemble du personnel sur la mise en œuvre des procédures de sécurité ?
- Ce qu’impose (ou pas) la laïcité
Soyons vigilants aux amalgames et stigmatisations. Le code du travail est clair, les seules exigences de l’employeur sur la tenue et l’apparence des salariés doivent être liées aux obligations de sécurité ou aux missions de service public en contact avec les usagers. C’est aussi le moment d’interroger les politiques de recrutement et de GRH (conscientes ou non) qui ne permettent pas toujours la mixité des sexes, des origines sociales et/ou territoriales…
- Rappeler la loi sur le racisme et les discriminations
À l’heure où les discours et pratiques xénophobes se multiplient, il est nécessaire de rappeler la loi qui bannit tout propos ou comportement discriminatoire, notamment en fonction de la religion, du sexe, de l’origine, du nom, de la couleur…
L’Etat d’urgence… permanent ?
La CGT s’inquiète de la mise en place, dans la durée, de l’état d’urgence car il permet sur simple décision des préfets :
- Des perquisitions à toute heure, y compris dans les entreprises (casiers…)
- Des assignations à résidence
- L’instauration de couvre-feu et la limitation de la circulation
- La fermeture de salle ou de lieu de réunion
- L’interdiction des réunions « de nature à entretenir le désordre »
- La dissolution d’associations qui « participent à la commission d’actes portant une atteinte grave à l’ordre public »
À noter : l’état d’urgence ne donne pas d’avantage de pouvoirs aux employeurs.
Refusons le racisme et les amalgames
Liberté, égalité, fraternité
Les lieux des attentats symbolisent ce que les terroristes ont voulu détruire : les valeurs humanistes, le vivre et le travailler ensemble. L’objectif des terroristes : instaurer un climat de peur et de défiance et monter les populations les unes contre les autres. Après la tristesse, la rage et la colère, il nous faut donc faire preuve de lucidité collective pour ne pas tomber dans le piège qui nous est tendu. Ouvrir un débat serein pour comprendre comment nous en sommes arrivés là et définir les moyens de lutter contre le terrorisme.
Renforcer notre sécurité passe-t-elle par une remise en cause des libertés ?
L’instauration de l’état d’urgence permet sans aucun contrôle judiciaire de limiter considérablement les libertés. Le risque est que cette mesure s’installe dans la durée et remette en cause notre état de droit. Les attentats ne doivent pas être instrumentalisés pour bâillonner la liberté d’expression : pourquoi avoir interdit la manifestation pour le climat alors que les marchés de Noël, rassemblements sportifs et culturels étaient autorisés ?
La France, dans la droite ligne Patriot Act de George W. Bush, a fait le choix depuis plusieurs années de renforcer considérablement le renseignement, permettant l’interception en masse des données. Sauf que des dires des spécialistes, ces mesures liberticides sont inefficaces. Il faut d’abord renforcer les capacités d’investigation, le nombre d’enquêteurs, de juges…et la coordination au niveau européen.
Comment faire vivre la République ?
La République et ses valeurs, on en entend beaucoup parler, sauf que force est de constater que la liberté, l’égalité et la fraternité s’exercent peu au quotidien. Allons-nous encore longtemps les subordonner à la question économique ? Il n’est plus possible d’accepter que faute de moyens, notre école ou notre système de soin ne traitent pas tous les citoyens à égalité, que des territoires entiers soient abandonnés, que le racisme et les discriminations se banalisent. Il nous faut nous battre pour défendre les droits des femmes, remis en cause par l’extrême droite et les fondamentalismes religieux.
Faut-il revoir notre politique d’immigration ?
Les attentats ont été commis par des citoyens français ou belges et non par des migrants. Il nous faut combattre les amalgames : accueillir des réfugiés, c’est protéger les opposants démocrates des dictatures, c’est mettre les actes de notre pays en cohérence avec ses valeurs affichées. Alors que ces attentats nous permettent maintenant d’imaginer plus concrètement ce que c’est que la guerre au quotidien. Après avoir bénéficié d’une vague de solidarité mondiale, notre réponse serait de fermer la porte aux réfugiés et de tourner le dos au droit d’asile ?
Débattons de ses questions ensemble sur nos lieux de travail et de vie. Renforcer le lien social, n’est-ce pas aussi un moyen pour garantir notre sécurité ?