Le divorce des cadres et des directions s’accroit

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À l’occasion de son 18e congrès organisé du 20 au 23 mars à Perpignan, la CGT des Ingénieurs, cadres et techniciens (Ugict-CGT) rend public son baromètre construit en partenariat avec Sécafi sur la situation et les aspirations des cadres.

Ce sondage réalisé par Viavoice fait ressortir le divorce des cadres avec les directions d’entreprises. L’ensemble des indicateurs reste au rouge, avec une dégradation depuis le précédent baromètre Ugict.

  • Un mécontentement salarial qui monte

59 % des cadres considèrent que leur rémunération est en décalage avec leur temps de travail (+11 points depuis 2015), 53 % avec leur implication (+2 points depuis 2015). Cette colère est nettement plus marquée dans la fonction publique, où l’austérité salariale est largement dénoncée : 70 % des cadres de la fonction publique considèrent que leur rémunération est en décalage avec leur implication (+15 points depuis 2015), 69 % qu’elle est en inadéquation avec leur temps de travail (+25 % points depuis 2015). Sur chacune des questions les femmes affichent une insatisfaction plus importante, ce qui confirme leur lucidité sur les inégalités salariales.

  • Un temps et une charge de travail qui explosent

62 % des cadres considèrent que leur charge de travail a augmenté et 51 % que leur temps de travail a augmenté. Ils sont 46 % à déclarer travailler plus de 45 h hebdomadaires, et 60 % à déclarer travailler durant leurs jours de repos. Ces chiffres illustrent du présentéisme et de la disponibilité permanente qui sont toujours associés à la responsabilité professionnelle et sont au cœur des mécanismes de plafond de verre excluant les femmes des responsabilités professionnelles.

  • Un management qui nie le rôle contributif des cadres

62 % des cadres considèrent qu’ils ne sont pas associés aux choix stratégiques et 54 % d’entre eux que les choix ou pratiques de leur entreprise ou administration entrent régulièrement en contradiction avec leur éthique professionnelle. Par ailleurs, 42 % considèrent que le management se détériore. Au cœur du système d’évaluation, évaluateurs et évalués, les cadres sont très critiques : 68 % considèrent que l’évaluation professionnelle est fondée sur de mauvais critères et 60 % qu’elle manque de transparence. Alors que les pratiques de ranking et d’instrumentalisation de l’évaluation pour licencier, mettre sous pression et casser le collectif de travail ont fait l’actualité dans certaines entreprises, la critique des systèmes d’évaluation est majoritaire dans l’encadrement.

Ce sondage démontre l’impasse économique et sociale du Wall Street management, le management par les coûts, qui soumet l’entreprise et le travail aux seuls objectifs d’augmentation de la valeur actionnariale. Le résultat ? Une démobilisation des cadres empêchés d’exercer leur professionnalisme et leur éthique professionnelle, pourtant déterminants pour garantir au quotidien le respect de la loi et de l’intérêt général dans les pratiques des entreprises et administrations. Et un grave problème de santé publique avec l’explosion des phénomènes de burn out.

L’UGICT-CGT appelle le patronat et le gouvernement à prendre toute la mesure de la situation et à y apporter enfin les réponses qui s’imposent, notamment dans la négociation sur l’encadrement ouverte en décembre 2017 et bloquée par le MEDEF (sur un mini-site dédié : encadrement.ugictcgt.fr, l’Ugict a mis en ligne des décryptages, des vidéos explicatives et une série de propositions et d’outils militants). 44 % des cadres disent souhaiter une définition de l’encadrement qui ne se limite pas aux seuls encadrants mais intègre aussi les experts (seulement 23 % souhaite un statut réservé aux seuls encadrants). Ils souhaitent que de nouveaux droits soient associés au statut cadre, et notamment 90 % à exiger un droit de refus, d’alerte et l’alternative, pour leur permettre de faire primer leur éthique professionnelle, 89 % un droit effectif à la déconnexion et 94 % à souhaiter une égalité professionnelle femmes / hommes en matière de déroulement de carrière et de rémunération.

L’Etat est directement interpellé dans ses responsabilités d’employeur. Au lieu d’importer du privé des méthodes de management aujourd’hui largement décriées, il convient de reconnaître et de rémunérer les qualifications et le travail des fonctionnaires, et de leur donner enfin les moyens d’exercer leurs missions de service public. La mobilisation du 22 mars sera l’occasion de démontrer encore une fois l’attachement des fonctionnaires à leur métier et à l’intérêt général. Pour répondre aux défis d’aujourd’hui et de demain, Emmanuel Macron ferait mieux de s’appuyer sur cet atout plutôt que de vouloir casser la fonction publique.

À Perpignan, le 20 mars 2018

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