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Qui sont les professions techniciennes et intermédiaires ?
Source, INSEE, Des professions intermédiaires de plus en plus nombreuses et féminisées, 19/02/2020
En 2018, en France, 7 millions de personnes exercent une profession intermédiaire, soit 26 % de l’emploi total. Cette part a augmenté de 6 points depuis 1982, en lien avec l’élévation du niveau de qualification et la tertiarisation des emplois. Point commun à la diversité d’identités professionnelles : des métiers avec une forte expertise et l’aspiration à la reconnaissance sociale et salariale.
Source :
https://www.insee.fr/fr/statistiques/4311840
L’INSEE décompose les professions intermédiaires en six catégories socioprofessionnelles principales.
- La plus importante, avec 29 % de l’ensemble des professions intermédiaires, regroupe les professions intermédiaires administratives et commerciales des entreprises (assistant·e·s de direction, comptables, commerciaux et commerciales, etc.).
- Viennent ensuite, avec 23 %, celles de la santé et du travail social (infirmier·e·s, préparateur·rice·s en pharmacie, kinésithérapeutes, etc.).
- Les technicien·ne·s (de l’industrie, du bâtiment et travaux publics, de la logistique ou de l’informatique, etc.) représentent 18 % des professions intermédiaires
- Les professeur·e·s des écoles, instituteur·rice·s et assimilé·e·s (incluant les formateurs et formatrices, éducateur·rice·s sportifs ou assistant·e·s d’éducation) comptent pour 14 % des professions intermédiaires.
- Les contremaîtres et agent·e·s de maîtrise (chef·fe·s de chantier, d’équipe, de cuisine, etc.) représentent 9 % des professions intermédiaires.
- Enfin, les professions intermédiaires administratives de la fonction publique (secrétaires de mairie, médicales ou administratives, rédacteur·rice·s territoriaux, contrôleurs et contrôleuses des finances et autres agent·e·s de catégorie B de la fonction publique…) représentent 7 % de l’ensemble.
La composition des professions intermédiaires a évolué depuis 1982. La part des professions intermédiaires de la santé et du travail social a augmenté (+ 8 points), en raison notamment du vieillissement de la population, de même que celle des professions intermédiaires administratives et commerciales des entreprises (+ 6 points), sous l’effet de la tertiarisation de l’économie. À l’inverse, avec le repli des emplois industriels, la part des contremaîtres et agent·e·s de maîtrise a diminué (– 7 points).
20 % des professions techniciennes et intermédiaires sont encadrant·e·s et 52 % le sont ponctuellement[1].
Source :
https://www.insee.fr/fr/statistiques/4311840
Des professions de plus en plus féminisées, diplômé·e·s et…déclassées
En 2018, les professions intermédiaires sont majoritairement occupées par des femmes (53 %) et des personnes diplômées du supérieur (62 %), notamment dans l’enseignement et la santé. Les jeunes sont de plus en plus diplômé·e·s du supérieur, avec des niveaux d’études plus élevés. Suite à la réforme LMD, les diplômes de technicien·ne·s, les DUT et BTS, sont en train de se transformer en bac +3. Par ailleurs, les diplômé·e·s bac +4 et 5 sont de plus en plus nombreux et nombreuses à être recruté·e·s sur des emplois de ces catégories alors qu’auparavant ces diplômes ouvraient à la reconnaissance du statut cadre.
Cette situation est particulièrement marquée dans les métiers féminisés. Contrairement aux emplois cadres où la mixité se développe, la ségrégation professionnelle reste forte chez les professions intermédiaires avec des emplois féminisés (administratifs, santé, éducation) et des emplois masculinisés (techniciens et agents de maîtrise). À qualification équivalente, les métiers féminisés sont moins bien rémunérés, avec un moindre déroulement de carrière et davantage de temps partiel. Ces « parois de verre » expliquent l’essentiel de l’écart salarial entre les femmes et les hommes de ces catégories.
Les mobilisations professionnelles, notamment dans la fonction publique, ont permis de reclasser plusieurs de ces métiers féminisés en catégorie A/cadres. C’est le cas des infirmier·e·s et des assistant·e·s sociaux·ales dont le diplôme est maintenant reconnu à bac +3 avec le statut cadre. C’est aussi le cas depuis 40 ans des institutrices/instituteurs devenu·e·s professeur·e·s des écoles avec un alignement théorique de leur statut sur celui des enseignant·e·s du 2è degré. Cependant, l’INSEE comptabilise toujours ces catégories parmi les professions intermédiaires, au vu de leur situation objective, notamment salariale…
Ce déclassement joue également de l’autre côté de l’échelle pour des métiers reconnus comme employés alors qu’ils recrutent désormais au minimum à bac +2, et devraient donc être professions intermédiaires.
C’est le cas de beaucoup de métiers tertiaires, et notamment les assistant·e·s, assistant·e·s de direction…désormais recruté·e·s à bac+2 voire bac +5 et souvent toujours reconnu·e·s et rémunéré·e·s comme des employé·e·s.
À noter : le baromètre Ugict-CGT est réalisé par un institut de sondage l’échantillon représentatif est donc constitué sur la base des critères INSEE sur le périmètre des professions intermédiaires. Il inclut donc les infirmier·e·s, assistant·e·s sociaux·ales, enseignant·e·s du 1e degré…qui ont pourtant, sur le papier, le statut cadre.
Source : https://www.insee.fr/fr/statistiques/4311840
Baromètre Ugict-CGT/Secafi/Viavoice – Enseignements de l’édition 2022
Sondage ViaVoice pour UGICT-CGT, Interviews réalisées en ligne du 3 au 14 novembre 2022, auprès d’un échantillon de 1 000 personnes, représentatif de la population appartenant à la catégorie des professions techniciennes et intermédiaires travaillant en France métropolitaine.
📉 Selon le dernier baromètre de la CGT Ingés Cadres Tech, moins de la moitié des personnels administratifs des entreprises ont été augmentés ou ont touché une prime ces derniers mois. Les femmes sont particulièrement désavantagées. https://t.co/kdCoKN1R0V
— Libération (@libe) December 5, 2022
Les questions d’actualité du baromètre 2022
1-La colère salariale au plus fort
Pour 71 % des interrogé·e·s, les salaires figurent parmi les 3 premières priorités de leur vie professionnelle. Les salaires font un bon de 14 points dans les priorités des technicien·ne·s et professions intermédiaires et se hissent au 1e rang ex aequo, au même niveau qu’une meilleure articulation des temps. C’est inédit depuis que le baromètre existe (2016).
Pour garantir le pouvoir d’achat, les augmentations collectives de salaires sont plébiscitées par 91 % des répondant·e·s, alors que 66 % disent être aussi favorables à des primes.
Pour la première fois, le salaire est en tête des priorités des professions intermédiaires.
➡️ https://t.co/Zg3pIx7hb6 pic.twitter.com/1bx0kTFmvy
— France Inter (@franceinter) December 5, 2022
Et pour cause…
Avec l’inflation, un effondrement salarial
- 59 % des sondés n’ont eu aucune augmentation de salaire depuis 1 an (61 % des femmes et 55 % des hommes).
- 54 % n’ont même pas eu de prime (56 % des femmes et 51 % des hommes).
Parmi celles et ceux qui ont eu une prime ou une augmentation de salaire, 60 % considèrent que cela ne leur permet pas de maintenir leur pouvoir d’achat (63 % des femmes et 58 % des hommes). Ce sont 69 % des agent·e·s du secteur public qui considèrent que leur augmentation salariale, quand elle existe, ne leur permet pas de maintenir leur pouvoir d’achat.
Qui se cumule au déclassement existant
Une majorité de sondé·e·s considèrent que leur salaire est en décalage avec leur implication, leur charge de travail, leur qualification et leurs responsabilités. Des chiffres encore plus élevés chez les femmes et dans la fonction publique. Dans le détail, ils et elles jugent leur rémunération en décalage avec
- Leur implication à 64 % (68 % chez les femmes, 60 % chez les hommes)
- Leur charge de travail à 62 % (66 % chez les femmes, 57% chez les hommes)
- Leurs responsabilités à 55 %
- Leur qualification à 54 % (58 % chez les femmes, 51 % chez les hommes)
- Leur temps de travail réel à 51 % (55 % chez les femmes, 47 % chez les hommes).
Ces chiffres sont de près de 10 points plus élevés que dans le baromètre « Cadres » et démontrent à quel point la colère salariale et le sentiment de déclassement sont forts chez les professions intermédiaires et techniciennes.
Pour les femmes, la double peine
Chez les professions techniciennes/intermédiaires, la ségrégation professionnelle est très forte, il y a des métiers masculinisés (technicien, agent de maîtrise, informaticien…) et des métiers féminisés (infirmière, assistante sociale, éducatrice, assistante de direction…)
Ces parois de verre sont un des principaux facteurs d’inégalité professionnelle, les métiers féminisés sont moins bien rémunérés, leurs qualifications et responsabilités sont moins reconnues. Les femmes en sont conscientes, puisqu’elles sont plus nombreuses que les hommes à considérer que leur rémunération est en décalage avec la réalité de leur travail.
L’inflation aggrave encore ce déclassement des métiers féminisés, puisque les femmes sont plus nombreuses à n’avoir eu ni augmentation de salaire ni prime. Lorsqu’elles en ont eu une, leur montant est plus faible, puisqu’elles sont plus nombreuses à estimer que cela ne permet pas de maintenir leur pouvoir d’achat.
Des fonctionnaires déclassé·e·s
Dans la fonction publique, l’ensemble des indicateurs du sondage sont plus négatifs, en particulier sur les questions de rémunération et de reconnaissance.
74 % des agent·e·s du secteur public considèrent que leur rémunération est en décalage avec leur implication (contre 60 % des salarié·e·s du privé)
- 68 % qu’elle est en décalage avec leur charge de travail (contre 59 % des salarié·e·s du privé)
- 66 % qu’elle est en décalage avec leurs responsabilités (contre 50 % des salarié·e·s du privé)
- 65 % avec leur qualification (contre 50 % des salarié·e·s du privé)
- 60 % avec leur temps de travail réel (contre 47 % des salarié·e·s du privé).
2-Grande démission ?
Un quart des sondé·e·s envisage de changer de travail dans les 12 prochains mois, y compris en démissionnant, ce chiffre monte à un tiers chez les seul·e·s salarié·e·s du privé, chez les personnes de 30 à 39 ans et dans le commerce, les transports et l’hôtellerie restauration. En moyenne, c’est seulement 60 % des répondant·e·s qui disent ne pas envisager de changer de travail dans les 12 prochains mois.
Les principales motivations sont :
- Un meilleur salaire et de meilleures perspectives de carrière
- Le goût et le sens du travail
- Une meilleure articulation vie professionnelle/vie personnelle.
À noter que ce sont tout de même 15 % des fonctionnaires qui envisagent de changer de travail, avec comme principale motivation pour 34 % d’entre eux (et 45 % dans la fonction publique hospitalière), le fait d’être en désaccord sur la stratégie et les valeurs de son administration.
Un chiffre qui apparaît élevé au regard des données issues de l’enquête emploi INSEE de 2018 dans laquelle 8 % des professions intermédiaires disaient vouloir changer d’emploi
3- L’attachement à la retraite à 60 ans avec 75 % du salaire de fin de carrière.
- 83 % des répondant·e·s souhaitent une réforme des retraites qui garantisse une pension au moins égale à 75 % du salaire de fin de carrière.
- 65 % des répondant·e·s souhaitent une réforme des retraites qui rétablisse l’âge de départ à 60 ans avec une prise en compte des années d’études. Un chiffre particulièrement élevé dans les secteurs du soin et du lien (80 % dans l’éducation et 70 % dans le secteur sanitaire et social) dans lesquels les professionnel·le·s considèrent impossible de faire ce métier après 60 ans.
- 52 % des répondant·e·s souhaitent une réforme des retraites financée en partie par la mise à contribution des dividendes (et 30% ne se prononcent pas, essentiellement dans la fonction publique).
Les professions intermédiaires et techniciennes sont encore plus nombreuses que les cadres à souhaiter le retour de la retraite à 60 ans, probablement du fait de la pénibilité de beaucoup de ces métiers.
Cette volonté se traduit par une forte disponibilité à l’action.
Pour défendre leur retraite,
- 74 % sont prêt·e·s à signer une pétition (et 69 % pour gagner une augmentation de salaire)
- 54 % à manifester (et 47 % pour gagner une augmentation de salaire)
- 46 % à faire grève (et 44 % pour gagner une augmentation de salaire)
- 41 % à se syndiquer (et 39 % pour gagner une augmentation de salaire).
Dans un contexte de forte inflation et de mobilisation salariale, le fait que la volonté de mobilisation soit systématiquement plus élevée en matière de retraite que de salaires confirme le caractère explosif d’un éventuel report de l’âge de départ en retraite !
4- Violences sexistes et sexuelles, 5 ans après #metoo toujours l’impunité
- Seuls 1/3 des professions intermédiaires disent qu’un plan de prévention des violences sexistes et sexuelles existe dans leur entreprise et leur administration. Une vision fortement marquée par le genre : c’est le cas de 40 % des hommes et de seulement 25 % des femmes !
- Seuls 10% des répondant·e·s qui ont été témoins ou victimes de violences sexistes et sexuelles disent que l’agresseur a été sanctionné !
Les constantes du baromètre professions techniciennes et intermédiaires
Depuis son existence en 2014, le baromètre professions techniciennes et intermédiaires fait apparaître des tendances constantes. L’édition 2022 revient dans la moyenne, après un pic d’insatisfaction particulièrement marqué en 2021, suite à la crise sanitaire et à l’absence de reconnaissance de l’implication exceptionnelle des professions intermédiaires et techniciennes.
Une vision critique du management
Seuls 15 % des professions intermédiaires considèrent que les pratiques managériales se sont améliorées cette année et 38 % qu’elles se sont dégradées. Le Wall Street management, le management par les coût, est désormais bien installé dans le privé, une majorité de répondant·e·s estime donc que les pratiques managériales restent stables, et tout de même un tiers qu’elles se sont dégradées. Dans le public, l’importation de ces pratiques managériales est en cours via le « new public management », et sont fortement contestées : ce sont 47 % des professions intermédiaires du public qui considèrent que les pratiques managériales se sont dégradées !
Les systèmes d’évaluation individuelles sont très critiqués
- 63 % considèrent qu’ils ne sont pas fondés sur les bons critères. Les contremaitres et agentes de maîtrise, en situation d’encadrement et d’évaluation d’autres salarié·e·s sont particulièrement critiques et sont 77 % à partager ce point de vue !
- 59 % estiment que les systèmes d’évaluation individuelle ne reconnaissent pas leur travail.
- 58 % qu’ils ne sont pas transparents, ce chiffre grimpe à 73 % chez les technicien·ne·s de l’industrie et 74 % chez les contremaîtres et agent·es de maîtrise !
En effet, l’évaluation individuelle est au cœur de la standardisation du travail des professions intermédiaires, avec des objectifs chiffrés déconnectés du travail réel et du sens et du contenu des missions. Une critique particulièrement forte dans les grandes entreprises, dans la fonction publique et chez les technicien·ne·s de l’industrie et les contremaîtres et agent·e·s de maîtrise pourtant directement acteur·rice·s de l’évaluation.
Déficit de reconnaissance et contradictions éthiques
Une expertise professionnelle non reconnue
Une majorité de professions intermédiaires et techniciennes considère que son expertise professionnelle n’est pas reconnue (47 % contre 41 % de oui et 12 % qui ne se prononcent pas). Le chiffre culmine dans la fonction publique avec 53 % de répondant·e·s qui estiment son expertise non reconnue contre 44 % dans le privé.
Seule catégorie qui considère encore son expertise reconnue, les technicien·ne·s de l’industrie, dont la fiche de poste est centrée sur l’expertise technique et qui sont moins concerné·e·s par la taylorisation du travail relationnel en cours dans les métiers du soin et du lien.
Lorsqu’elle existe, cette reconnaissance est d’abord sociale, dans 57 % des cas, avant d’être salariale à 34 % (43 % pour les hommes et seulement 25 % des femmes), ce qui confirme le déclassement salarial très fort des professions intermédiaires, notamment celles qui sont féminisées.
De la formation professionnelle mais pas de progression de carrière
- Près de 40 % des professions intermédiaires et techniciennes ont suivi une formation ces deux dernières années, notamment les moins de 30 ans qui sont 60 % dans ce cas. Cependant, pour les ¾ de celles et ceux qui se sont formé·e·s, cela n’a pas été suivi d’évolution de carrière, notamment pour les plus de 50 ans et pour les fonctionnaires qui sont 80 % dans ce cas.
- Plus du tiers (36 %) des professions intermédiaires et techniciennes qui ont demandé à suivre une formation n’ont pas obtenu la validation de leur employeur et ont donc dû y renoncer ou la financer sur leurs deniers personnels. C’est particulièrement vrai dans le privé et notamment dans le commerce, les transports, l’hébergement et la restauration où plus de 60 % des salarié·e·s se sont vu refuser leur demande de formation !
Des responsabilités qui augmentent, un intérêt du travail qui diminue
- 46 % des professions intermédiaires déclarent que leurs responsabilités augmentent et seulement 6 % qu’elles diminuent.
- Cependant, seuls 14 % des répondant·e·s déclarent que l’intérêt de leur travail augmente, et 36 % estiment qu’il diminue. Une situation particulièrement marquée pour les enseignant·e·s du premier degré qui sont 47 % dans ce cas alors qu’ils et elles sont 57% à déclarer que leurs responsabilités augmentent ! Avoir plus de responsabilités ne se traduit donc malheureusement pas systématiquement par une progression de carrière ou par une augmentation de l’intérêt du travail. Les glissements de responsabilités ne sont pas toujours souhaités et sont rarement reconnus, ils peuvent même parfois détourner de l’expertise et du cœur de métier (responsabilités managériales, organisationnelles, reporting…).
Des conflits éthiques réguliers
- 63 % des professions intermédiaires et techniciennes disent que régulièrement les choix ou pratiques de leur administration entrent en contradiction avec leur éthique professionnelle. Un chiffre encore plus élevé que chez les cadres qui sont 53 % dans cette situation (https://ugictcgt.fr/barometre-cadres-2022/) qui confirme la perte de sens du travail prescrit, avec des objectifs fixés déconnectés du sens des missions.
Ce chiffre est particulièrement élevé dans la fonction publique où il atteint 72 %. Rien d’étonnant à ce que le nombre de professionnel·le·s souhaitant changer de travail soit si élevé, avec un quart d’entre eux qui déclare souhaiter le faire du fait de désaccord avec les stratégies ou valeurs de leur entreprise ou administration.
Plus d’un tiers des professionnel·le·s (35 %) déclare ne pas avoir les moyens de fournir un travail de qualité. Ce sont 44 % des agent·e·s du secteur public, notamment dans la santé, l’enseignement et l’action sociale qui sont dans cette situation contre 30 % des salarié·e·s du privé.
Une majorité de professionnel·le·s souhaiterait disposer d’un droit d’alerte dans le cadre de l’exercice de leurs responsabilités, afin de pouvoir refuser de mettre en œuvre une directive contraire à leur éthique. Une proposition plébiscitée par les 30/40 ans qui sont 62 % dans ce cas !
Un temps de travail bien au-delà des 35h
- 58 % des professionnel·le·s interrogé·e·s déclarent avoir un temps de travail hebdomadaire de plus de 39 heures . Ils et elles sont même 14 % à travailler plus de 45 heures par semaine ! Une situation très marquée chez les enseignant·e·s du premier degré, les professions intermédiaires exerçant des missions d’encadrement (contremaitres, maîtrises…) et les professionnel·le·s du commerce, des transports et de l’hôtellerie restauration.
- 53 % des professions intermédiaires et techniciennes considèrent que leur charge de travail a augmenté depuis l’année dernière et seulement 5 % qu’elle a diminué.
- 51 % des répondant·e·s déclarent effectuer des heures supplémentaires (dont 72 % des moins de 30 ans !). Un chiffre minoré car certain·e·s ne considèrent pas faire d’heures supplémentaires lorsque ce travail n’est pas reconnu par l’employeur. Par exemple, alors qu’elles et ils font partie des professionnel·le·s déclarant le temps de travail hebdomadaire le plus élevé, les enseignant·e·s ne sont que 34 % à déclarer faire des heures supplémentaires. Pour autant, 27 % de celles et ceux qui effectuent des heures supplémentaires disent qu’elles ne sont ni récupérées ni rémunérées, un chiffre particulièrement élevé chez les femmes (30 % pour les femmes et 23 % pour les hommes) et dans la fonction publique (34 % d’heures supplémentaires ni payées ni récupérées, contre 24 % dans le privé).
Le numérique vecteur d’intensification du travail
Le numérique est d’abord vécu pour 57 % des répondant·e·s comme intensifiant le travail, avec des sollicitations et interruptions permanentes, davantage de reporting…
Une minorité (43 %) considère que les technologies de l’information et de la communication facilitent le travail. La critique du numérique est très marquée chez les professions intermédiaires de la santé et du social qui sont seulement 29 % à considérer que cela facilite leur travail.
En effet, le numérique standardise le travail relationnel, limite les marges de manœuvres des professionnel·le·s et leurs possibilités d’interaction avec les usagers. Au contraire, pour les métiers administratifs, le numérique est vécu comme facilitant le travail.
Avec le reflux du télétravail, qui concerne désormais, d’après la DARES, en moyenne 20 % des professions intermédiaires, les répondant·e·s sont moins nombreux et nombreuses à considérer que cela se traduit par un débordement de la vie professionnelle sur la vie personnelle, un chiffre qui atteint tout de même 44 %, avec un vécu majoritaire dans les professions dans lesquelles l’usage du numérique a franchi un cap avec la pandémie, notamment chez les enseignant·e·s du premier degré (73 %) qui communiquent désormais souvent directement ainsi avec les familles, leurs collègues…
Une meilleure articulation vie professionnelle/vie personnelle reste donc en tête des priorités des professions intermédiaires et techniciennes, désormais rejoint par le salaire. Les professions intermédiaires sont une large majorité, 63 % à souhaiter disposer d’un droit effectif à la déconnexion afin de préserver leur vie privée et leur santé.
Conclusion : Changer de braquet pour retenir les qualifications !
Alors qu’un quart des professions intermédiaires et techniciennes envisage de changer de travail dans les 12 prochains mois, l’Ugict-CGT appelle les employeurs à ouvrir le chantier de la reconnaissance de ces professions indispensables.
Cela passe par :
- Une reconnaissance salariale : la revalorisation des professions féminisées, l’indexation des salaires sur l’inflation, la reconnaissance des qualifications et responsabilités exercées
- Une meilleure articulation des temps : une réduction du temps de travail, en commençant par récupérer ou rémunérer toutes les heures supplémentaires, la limitation des horaires atypiques et davantage de souplesse horaire, notamment pour les parents et aidants familiaux
- Un management reposant sur la reconnaissance de l’expertise professionnelle et de la technicité en lieu et place du management par les coûts.
Pour garder les qualifications, il faut commencer par les reconnaître !