[Podcast Ép. 92] Billet 🔊 – Violences sexistes et sexuelles : le silence est brisĂ©, mais les moyens de lutte restent dĂ©risoires

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C’est Ă  nouveau une marĂ©e violette qui a dĂ©ferlĂ© dans les rues de Paris et en rĂ©gion samedi 19 novembre. Pour la quatrième fois depuis 2018, la couleur de la rĂ©volte fĂ©ministe contre les violences faites aux femmes s’est rĂ©pandue constellĂ©e de slogans plus accusateurs les uns que les autres pour dĂ©noncer l’inaction gouvernementale.

 

Car en ce domaine comme dans d’autres, Emmanuel Macron cause mais fait peu. Et dĂ©jĂ  le bilan de son premier quinquennat n’avait brillĂ© ni dans la lutte contre les inĂ©galitĂ©s entre les femmes et les hommes ni contre les violences sexistes et sexuelles, ainsi que le dĂ©nonçait le rapport d’Oxfam France en mars dernier. Il pointait ainsi que « La politique en faveur de l’égalitĂ© femmes-hommes reprĂ©sente 0,25 % du budget de l’État ; en moyenne 1 femme est tuĂ©e par son conjoint ou ex-conjoint tous les 3 jours ».

Ă€ l’occasion de cette journĂ©e, l’exemple de l’Espagne a Ă©tĂ© largement commentĂ©. C’est qu’au-delĂ  des PyrĂ©nĂ©es, le nombre de fĂ©minicides a chutĂ© de 24 % en quinze ans grâce Ă  une panoplie de mesures transversales Ă  partir de 2004, avec l’adoption d’une loi cadre jugĂ©e comme la plus protectrice au monde par l’ONU. Elle entend imposer une « protection intĂ©grale contre la violence conjugale » en articulant prĂ©vention, protection des victimes et condamnation des agresseurs. Alors qu’en France on n’en est encore Ă  des expĂ©rimentations de tribunaux spĂ©cialisĂ©s, en Espagne il existe 107 de ces « tribunaux de la violence Ă  l’encontre de la femme » rĂ©partis sur tout le territoire avec des compĂ©tences Ă  la fois au civil et au pĂ©nal, ce qui simplifie considĂ©rablement les procĂ©dures. Et le pays s’est donnĂ© les moyens de sa politique avec un « pacte d’État » signĂ© en 2017 qui garantit un budget d’un milliard d’euros sur cinq ans (2018-2022). RĂ©sultat, l’Espagne consacre en moyenne 16 euros par personne, contre 5 euros en France.

Dire que rien n’a bougĂ© dans notre pays ne serait pas rendre justice au mouvement #Metoo qui a permis d’Ă©veiller les consciences et libĂ©rer la parole des femmes. Cette annĂ©e, il y a 30 % de plaintes en plus pour violences sexuelles, ce qui tĂ©moigne d’un niveau de conscience de plus en plus aigu. Mais en face, les politiques publiques ne sont pas Ă  la hauteur. Il faut des dĂ©cisions politiques et des actes forts, car la majeure partie des victimes ne voit aucune suite donnĂ©e Ă  leur signalement. Et si les fĂ©minicides n’en finissent plus d’endeuiller les JT, ils sont la partie visible (mais toujours trop tard) d’une violence banale, insuffisamment combattue au sein mĂŞme de l’entreprise ou des services publics. Ainsi, huit femmes sur dix sont victimes de sexisme au travail, 90 % des plaintes pour harcèlement sexuel au travail sont classĂ©es sans suite soit 10 % de plus que les plaintes qui concernent le cercle familial. Dans plus de neuf cas sur dix (93 %), ces femmes dĂ©clarent des consĂ©quences sur leur sentiment d’efficacitĂ© personnelle. Et si c’est vrai dans le privĂ©, la fonction publique n’est pas plus protectrice, puisque 97% des faits communiquĂ©s aux cellules de signalement de la Fonction publique d’État sont sans classĂ©s suite. Et cela dans un secteur oĂą les femmes sont pourtant majoritaires.

Le mouvement #Metoo et ses dĂ©clinaisons dans certains domaines a permis sous la pression des syndicats et des associations l’adoption en juin 2019 par l’Organisation internationale du travail (OIT) d’une norme mondiale contre la violence et le harcèlement Ă  l’égard des femmes.

Mais cette Convention 190 et la recommandation 206 n’est toujours pas rĂ©ellement ratifiĂ©e par la France : « ça en dit long sur la volontĂ© du gouvernement sur le sujet … », commente Sophie Binet, pilote du collectif confĂ©dĂ©ral « Femmes Mixité » et secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale de la CGT de l’encadrement.  Dans un courrier intersyndical, 8 organisations syndicales (CGT, FO, CFTC, CFDT, CFE-CGC, FSU, Solidaires et UNSA), interpellent unitairement Élisabeth Borne, la Première ministre sur les violences sexistes et sexuelles au travail afin que soit organisĂ©e « une table ronde multilatĂ©rale pour rĂ©aliser un bilan des quelques mesures mises en place depuis 2018 et identifier les nouvelles dispositions Ă  adopter ». La CGT demande que la France respecte ses engagements et que soient mises en place des sanctions pour toutes les entreprises et Ă©tablissements qui n’ont pas de plans de prĂ©vention des violences sexistes et sexuelles et de dispositifs de signalement nĂ©gociĂ©s avec les syndicats. Ces enjeux seront au cĹ“ur d’un webinaire organisĂ© par le collectif confĂ©dĂ©ral Femmes mixitĂ© de la CGT ce 25 novembre.  

 

Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT

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